lundi 31 mars 2008

LA SOUVERAINETE DE L'ETAT AU DEBUT DU XXIè SIECLE, LE CAS DU CONGO-BRAZZAVILLE

Cette œuvre est dédiée à mon tuteur pour tous ses efforts pour le financement de mes études en France.

Mes remerciements

D’une part à monsieur le professeur Dominique Breillat pour avoir assuré la direction de cette étude ;

Et d’autre part, à mes père et mère, Edouard Bouenitamio et Véronique Lemba, pour leurs sacrifices à mon égard, à Tarbell-Glène Mabandza et à son épouse, à Hélène-Solange Nkouka, à mes frères et sœurs et à toute ma famille ;

De même à Vianney-Arnaud Backela, Galiciat-Rose Nkombo, Abou Yahaya, à l’association des étudiants et ressortissants congolais de Poitiers, à tous mes amis et connaissances qui ont contribué sous toutes les formes à la réalisation de ce mémoire.

Je leur témoigne ma profonde gratitude.

SOMMAIRE

ABBREVIATIONS

INTRODUCTION

CHAPITRE I : LA SOUVERAINETE MENACEE (PARTI I)

SECTION I : LA SOUVERAINETE : ELEMENT FONDAMENTAL DE L’ETAT

§1 : Bref historique de la souveraineté au Congo

§2 : La consécration de la souveraineté au Congo

SECTION II : LA CONFRONTATION AVEC LE DROIT NOUVEAU

§1 : L’apport des organisations internationales

§2 : La prolifération des normes sur les droits de l’homme

SECTION III : LE DEPOUILLEMENT DE L’ETAT

§1 : La limitation des compétences traditionnelles

§2 : Le poids de la conjoncture économique

CHAPITRE II : LA SOUVERAINETE SAUVEGARDEE (PARTI II)

SECTION I : LA SOUVERAINETE DANS LA SURVIE DE L’ETAT

§1 : Le fondement de la survie de l’Etat

§2 : Observations sur cette constatation

SECTION II : LE MODELE ETATIQUE DOMINANT

§1 : La décentralisation de l’Etat

§2 : L’universalisation du fédéralisme

CONCLUSION

TABLE DES MATIERES

ABBREVIATIONS ET SIGLES

ACP : Afrique, Caraïbes, Pacifique

AEF : Afrique équatoriale française

AFDI : Annuaire français de droit international

AG : Assemblée générale (ONU)

Al. : Alinéa

AOF : Afrique occidentale française

APD : Archives de philosophie du droit

Art. : Article

Ass. : Assemblée

BEAC : Banque des Etats de l’Afrique centrale

BIRD : Banque internationale pour la reconstruction et le développement

Bull. : Bulletin

C/ : Contre

CAMES : Conseil d’Afrique et Malgache pour l’enseignement supérieur

Cass. Crim : Chambre criminelle de la cour de cassation

CE : Conseil d’Etat ; Conseil de l’Europe

CEDEAO : Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest

CEE : Communauté économique européenne

CEMAC : Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale

Cf. : Confère

CFA : Communauté financière d’Afrique (Afrique de l’ouest), coopération financière d’Afrique (Afrique centrale)

CICR : Comité international de la Croix-Rouge

CIJ : Cour international de justice

CJCE : Cour de justice des communautés européenne

CNRS : Centre national de recherche scientifique

CNS : Conférence nationale souveraine

COMIFAC : Commission des forêts d’Afrique centrale

CPJI : Cour permanente de justice internationale

CSCE : Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe

CSR : Conseil supérieur de la République

D.: Décret

Dollar US: Dollar américain (United States)

Ed. : Edition

FAC : Force des armées congolaises

FENU : Fonds des Nations-Unies pour l’équipement

FMI : Fonds monétaire international

FNSP : Fondation nationale de science politique

FRPC : Facilité de la réduction de la pauvreté et de la croissance

G: Groupe

GATT: General agreement for tariffs and trade

JDI: Journal de droit international

Km (2): Kilomètre (carré)

LGDJ: Librairie générale de droit et de jurisprudence

MCDDI: Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral

MNR : Mouvement national de la révolution

MONUC : Mission de l’Organisation des Nations-Unies au Congo (Kinshasa)

MPLA : Mouvement pour la libération de l’Angola

MSA : Mouvement socialiste africain

N° : Numéro

Ord.: Ordonnance

OHADA: Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique

OIG : Organisation intergouvernementale

OMS : Organisation mondiale pour la santé

ONG : Organisation non-gouvernementale

ONU : Organisation des Nations-Unies

OTAN : Organisation du traité de l’Atlantique nord

OUA : Organisation de l’unité africaine

P (PP) : Page, pages

PAM : Programme alimentaire mondial

PCT : Parti congolais du travail

PMRU : Programme en milieu ruro- urbain

PMU : Programme en milieu urbain

PNUD : Programme des nations-unies pour le développement

PPC : Parti progressiste congolais

PPTE : Pays pauvres très endettés

PU : Presses universitaires

PUF : Presses universitaires de France

RCA : République centrafricaine

RCADI : Recueil des cours de l’académie de droit international

RD(C) : République démocratique(du Congo)

Rec. : Recueil

Rés. : Résolution

RDISDP : Revue de droit international, de sciences diplomatiques et politiques

RFSP : Revue française de science politique

RGDIP : Revue générale de droit international public

RISS : Revue internationale des sciences sociales

RRJ : Revue de recherche juridique/ droit prospectif

S, SS : Suivante, suivantes

SFDI : Société française pour le droit international

SFIO : Section française de l’internationale ouvrière

SNPC : Société nationale des pétroles du Congo

T : Tome

UA : Union africaine

UDDIA : Union démocratique pour la défense des intérêts africains

UE : Union européenne

UDEAC : Union douanière des Etats de l’Afrique centrale

UNESCO : Organisation des Nations-Unies pour la science, la culture et l’éducation

URD- FDU : Union pour le rassemblement démocratique-Force démocratique unie

URSS : Union des Républiques socialistes soviétiques

V. : Voir

Vol. : Volume

ZEE : Zone économique exclusive

INTRODUCTION

L’Etat est le droit gouvernement de plusieurs ménages et de ce qui leur est commun avec puissance souveraine dira Jean Bodin. La souveraineté est une qualité reconnue à l’Etat. Cette faculté peut être récusée à une entité territoriale dépendant d’une autre. C’est ce qui a conduit la doctrine à la considérer comme le synonyme de l’indépendance politique[1]. Toute entité à laquelle est attribué le qualificatif d’« Etat » peut ne pas être souveraine par absence de la personnalité morale sur la scène internationale, corollaire de cette indépendance. Cette souveraineté systématisée en Occident, en l’occurrence sur le vieux continent a été exportée de par le monde dans toutes ses conquêtes.

La souveraineté est conçue comme un pouvoir de commandement. C’est une faculté internationalement reconnue d’exercice de ce pouvoir[2] que l’Etat lato sensu, voire une société, applique à ses rapports personnels. En ce sens, le pouvoir est constitué par l’ensemble de facteurs qui expliquent la faculté d’une personne d’influencer ou de déterminer la conduite d’autrui dans le domaine social[3]. Il y a un lien étroit entre la souveraineté et une collectivité humaine. En effet, ce concept pris dans le sens de commandement, c'est-à-dire la puissance exercée entre deux individus en relation réciproque, est inhérente à l’espèce humaine. Une telle historicité est le fruit de la théologie. Par conséquent, c’est à l’être le plus proche de Dieu que revient l’autorité de commandement sur les autres dans la collectivité.

C’est à l’homme que revenait ce privilège de commandement, puis au père de famille... Or, l’élargissement du nombre des membres de la collectivité a exigé un chef au dessus des chefs de famille qui fut donc l’aîné, le grand-père, le grand-oncle... Cette hiérarchisation est approuvée par la conclusion de l’apôtre Paul dans une de ses lettres adressées aux Corinthiens[4]. Cette déduction entre dans le dynamisme d’une pensée théocratique du pouvoir héritée de la loi mosaïque. Celle-ci est reconnue par toutes les civilisations de grandes religions monothéistes: c’est le représentant de Dieu qui commande la société, Umma dans la pensée islamique. Ainsi, le pape fut le souverain dans l’espace européen judéo-chrétien tandis que cette souveraineté devrait revenir au califat dans l’aire arabo-musulmane.

Pour l’apôtre Paul, que chaque personne se soumette aux autorités en charge car il n’y a point d’autorité qui ne vienne de Dieu et celles qui existent sont constituées par Dieu si bien que celui qui résiste à l’autorité se rebelle contre l’ordre établis par Dieu[5], contre donc Dieu lui-même. Or cela est le pire des péchés insusceptibles de pardon. En effet, cela vient justifier une hiérarchisation dans laquelle Dieu est l’être suprême au-delà duquel il n’y a aucun autre être. Il est le chef du Christ qui, à son tour, est le chef de l’homme[6]. D’où la portée de la maxime Omnis potestas nisi a Deo[7] dans la conception du pouvoir dans la société selon la pensée théocratique.

Mais si dans la pratique, c’est par la féodalité qu’est née la théorie juridique[8] de la souveraineté de l’Etat, il est vrai qu’en Europe occidentale cela est une contestation de l’autorité papale et impériale par le roi. Celui-ci ne voulait plus être assujetti par un homme qui n’avait pas le droit du glaive temporel[9] dès lors qu’il faut rendre à César ce qui est à César et à Dieu, ce qui est à Dieu[10]. Par conséquent, toutes les guerres de religion sont à l’évidence des guerres incompatibles avec les matières qui touchent directement les affaires de l’Etat dont le prince a la charge.

L’un des grands problèmes relatifs à la souveraineté consiste en l’illusion de pouvoir la ramener à des termes exclusivement juridiques[11]. Certes elle est le fondement du droit international public[12], elle ne s’appuie nullement à être une compétence générale prévue par le droit. Point de cristallisation du pouvoir de l’Etat au moyen âge, la souveraineté a gardé des orientations et des connotations irréductiblement politiques. L’antagonisme entre les aspects juridiques et politiques de la souveraineté a éclaté au grand jour au début du XXe siècle quand la doctrine s’est efforcée d’en domestiquer les allures incontrôlables pour la rendre compatible avec les exigences du droit.

En plus, la théorie juridique de la souveraineté est articulée autour d’un concept qui ne fait pas l’unanimité parmi les juristes. Elle est incapable de produire de l’ordre social ; elle est devenue un objet de confusion[13]. Elle est affirmée ou infirmée soit à l’Etat sur la scène internationale puisque seule la société internationale dans son ensemble est souveraine[14] ou sur la scène nationale dès lors que l’Etat se soumet à la souveraineté du droit[15], soit elle est partagée entre les deux sociétés, nationale et internationale ou dans l’Etat entre l’Etat et la Nation[16], voire refusée à l’Etat au profit de l’individu. D’où, la « personnalité » de l’Etat est considérée comme fictive et que toutes les relations des Etats ne sont que des relations individuelles des gouvernants.

Cette confusion sur la « souveraineté » est le propre des lacunes du vocabulaire français selon Carré de Malberg. En effet, ce vocabulaire ne rend pas compte de toutes les réalités que ce concept traduit[17]. En se fondant sur le vocabulaire allemand, il est arrivé à dégager trois mots de cette langue exprimant les réalités ou sens que revêt la souveraineté.

  1. La souveraineté en tant que la puissance de l’Etat, elle est de ce fait le pouvoir effectif qu’exerce une autorité dans son assiette d’action, le territoire (Staatsgewalt) ;
  2. La souveraineté considérée comme la puissance étatique, elle est par là même une indépendance absolue de l’Etat à l’égard d’une autre autorité (Souveränität) ;
  3. Et la souveraineté prise dans la perspective de maître, elle se révèle ici à la personne ou organe qui incarne le pouvoir de commandement (Herrscher).

De ce fait, la souveraineté dans la doctrine juridique francophone est synonyme de pouvoir, de l’indépendance d’action et de l’organe de décision. Par ce constat, le peuple à qui revient le droit d’élire la personne qui se chargera de la destinée de l’Etat est le souverain, ce que Rousseau appelle « souverain primaire ». De même, le parlement décide par ses lois le sort de la République, il exerce la souveraineté et le chef de l’Etat qui prend la décision de nommer ou révoquer un ministre est aussi souverain. Ainsi, on ne saurait parallèlement laisser de côté l’Union européenne qui décide en de nombreuses matières relevant de sa compétence comme c’est le cas pour le conseil de sécurité de l’ONU.

Par ailleurs, nous sommes dans une étude de recherches de la souveraineté de l’Etat au XXIe siècle qui s’articulera autour de la République du Congo. Après avoir circonscrit la souveraineté dans la sphère politique occidentale, nous devons admettre que la souveraineté dans cette logique est le propre de toutes les communautés humaines. Elle a eu des germes dans tous les coins de la terre même en Afrique comme le montre De Montmorency[18] puisque les hommes sont naturellement égaux et que leurs droits et leurs obligations sont les mêmes. Dans cet angle de vue, l’obéissance toujours d’un grand nombre d’individus à un petit nombre prouve l’universalité politique du pouvoir. Cette obéissance est le grand mystère de la politique à entendre Marion Ohouago-Madziba[19].

Le Congo-Brazzaville est un Etat assis sur une superficie de 342 000 km2, long de 1200 km près dans sa plus grande longueur du nord au sud avec 150 km d’ouverture sur l’Atlantique. Il est en plein golfe de Guinée, au cœur de l’Afrique, et à cheval sur l’équateur qui le traverse par Makoua dans le département de la Cuvette. Son territoire émergé est limité de la manière suivante :

1. La République centrafricaine au nord ;

2. Le Cameroun au nord-ouest ;

3. L’affluent Oubangui au nord-est qui le sépare de la RD Congo ;

4. L’enclave angolaise du Cabinda et la RD Congo ;

5. L’océan Atlantique au sud-ouest ;

6. Le Gabon à l’ouest ;

7. Et le fleuve Congo à l’est qui le sépare de la RD Congo.

Cet Etat est érigé sur un territoire longtemps réparti entre le royaume Kongo et ses vassaux : les royaumes Téké et Loango. Ce grand royaume dont la capitale politique fut Mbandza étendait sa souveraineté territoriale dans les pays du Niari et à Minkolo. Il partageait sa frontière au nord avec le royaume Téké et le royaume Loango se situait au-delà du massif de Mayombe, au sud des pays du Niari. C’est la bataille d’Ambuila au XVIIe siècle qui a modifié l’organisation politique de cette zone d’influence Kongo, ouverte à la colonisation française à la fin du XVIIIe siècle par l’exploration de Pierre Savorgnan de Brazza.

La conquête française fut précédée pour le compte du Roi des Belges de celle menée dans les pays du Niari et de Minkolo par Stanley, un journaliste britannique au service du roi Léopold II et membre de l’Association internationale du Congo. Il créa deux postes dans le Niari : actuels Makabana et Loudima. Mais la délimitation opérée par la conférence de Berlin de 1885 joua aux dépens de la Belgique par défaut des preuves irréfragables justifiant la possession[20] de la région parce que la France possédait des traités[21] signés entre le commis français et les rois de la région. Ainsi, la région devint française.

Cette étape permit à la France d’administrer ce territoire de son seul gré. Elle forma le Congo français par son adjonction au territoire de l’Ogooué[22] (Gabon). Ce Congo français devint en 1910 l’AEF par l’institution d’une administration déconcentrée plus rationnelle englobant le Moyen Congo, le Gabon, l’Oubangui-Chari et le Tchad. Elle laissa cette AEF entre les mains des propriétaires de concessions.

Le Moyen Congo devint une République sous l’appellation de « République du Congo » le 28 novembre 1958 après approbation massive[23] de la constitution de la Ve République en septembre 1958. Les lois du 18 août et du 7 décembre 1960[24] ont fixé la souveraineté du Congo-Brazzaville. Etat indépendant dès le 15 août 1960, il devrait rester membre de la Communauté[25] instituée par la constitution de 1958.

Il est peuplé par une composition des bantous et des pygmées. Les bantous avec 97 % de la population sont répartis entre les Kongo (48 %), Téké (22 %), Mbosi (13 %) et les Mekée, Oubanguiens, Kota, Sangha, Echira (et étrangers) représentent 14 %. Cette population est concentrée au sud en l’occurrence tout le long de la voie ferrée grâce à des conditions naturelles qui sont propices à la vie humaine.

Refuser une étude sur la souveraineté dans un Etat, objet et sujet de la mondialisation où la multiplication des échanges, la révolution des communications, les flux des biens et des personnes, tout contribue à unifier les hommes dans un « Etat universel[26] », est la source de remise en cause des mutations contemporaines affectant même le droit. La souveraineté pour les Etats du Sud reste encore à conquérir dès lors que l’importation des idéologies marxiste, capitaliste, socio-démocrate, néolibérale ou de toutes autres natures contribue toujours à renforcer la dépendance vis-à-vis des auteurs de ces idéologies. De ce fait, une exhortation à la valorisation des valeurs endogènes devrait être la voie de prédilection, les vainqueurs seront ceux qui y parviendraient. S’il faut se mettre à la place de l’Occident, nous finirons par apercevoir que l’endogenèse est la source de toutes les pensées occidentales par exemple sur l’Etat ou la Nation. Ainsi, les conceptions française et allemande de la Nation se sont opposées dans l’histoire.

Après 40 ans de vie dans le XXe siècle, le Congo-Brazzaville est confronté dans ce siècle présent à une « néo-modernité » qui associe homogénéité, hétérogénéité et extranéité. Tout cela englobe le vécu et le souhait des populations dont les rapports entre l’Etat et ses nationaux ne cessent de se transformer du jour au lendemain. Ce rapport de la souveraineté personnelle de l’Etat constitue la source d’une crise d’autorité si les gouvernants n’arrivent pas à harmoniser les rapports entre l’Etat, le territoire et la population.

Dans ce sillage, le Congo-Brazzaville est un Etat à l’instar des autres qui ne peuvent vivre seuls. Cette cohabitation engendre des rapports de force qui, en fonction de leur qualité, peuvent se neutraliser s’ils sont égaux ou s’attirer si une des forces est supérieure à l’autre. Cela s’explique dans une société internationale où tous les Etats n’ont pas la même grandeur géographique et ne sont pas organisés de la même manière. Les réclamations des Etats du Sud traduisent l’existence des inégalités entre les entités, sujets ou acteurs du droit international, économiquement et politiquement fortes. Ainsi, apparaît une menace de la souveraineté de l’Etat bien que posée comme principe de base dans la construction de l’ordre international[27].

En outre, les exigences de lutte contre la pauvreté pour relever le défi du développement conduit à des associations d’Etat afin de résister à des ingérences. En effet, il sera plus difficile de s’immiscer dans un ensemble vaste, géré par des institutions ayant la maîtrise de leur domaine de compétence. Par conséquent, les Etats utilisent cette politique d’intégration comme un moyen déterminant pour assurer leur survie face à des géants de la mondialisation dont la puissance de chacun est estimée à plus de celle de dix Etats dans certaines régions.

Par ailleurs, le combat de lutte contre la pauvreté appelle à de nombreuses réformes quant à la manière d’entreprendre l’autorité de l’Etat dans l’étendue du territoire national administrativement mal répartie. Ainsi, les difficultés liées à une étude sur la souveraineté de l’Etat dans lequel les techniques de la nouvelle communication sont déficitaires et surtout l’absence du droit à la communication des documents administratifs conduisent à orienter la réflexion sur deux points déjà évoqués.

D’une part, L’analyse de la souveraineté menacée par les ingérences politique et économique est le résultat des faiblesses de l’Etat dans l’harmonisation de ses liens étroits entre ses différentes composantes (chapitre I). Or, d’autre part, la souveraineté pour rendre l’autorité de l’Etat effective étant que droit personnel de l’Etat exige la réunion de certaines conditions par lesquelles le Congo-Brazzaville est censé assurer sa survie et défendre sa place dans une société animée par la puissance du plus fort (chapitre II ).

CHAPITRE I : LA SOUVERAINETE MENACEE

La personnalité morale de l’Etat est le corollaire de sa souveraineté. Cette dernière procure à l’Etat la capacité d’agir sur la scène internationale. Mais il arrive que l’Etat mène une politique subsidiaire d’un autre Etat[28]. La République du Congo-Brazzaville, Etat souverain, est organisée sur le modèle français qui reste jusqu’alors la source principale de son droit positif. De nombreux juristes[29] ou sociologues, voire les philosophes ont élaboré des théories abondantes sur la notion de la souveraineté. Celles-ci tendent à défendre une sorte de société par laquelle les maux seront éradiqués parmi les hommes. Toutes ces théories se sont confrontées au cours de l’histoire[30] tout en engendrant des conséquences de toutes natures[31].

L’évolution humaine a des impacts sur le cadre même de l’exercice du pouvoir. Ces impacts peuvent constituer une menace pour la souveraineté de l’Etat. Mais, quels sont ces impacts justificatifs d’une telle menace ? La réponse à cette question est à rechercher dans la souveraineté considérée comme un élément définitionnel attribué[32] à l’Etat (section I), puis sa confrontation avec le nouvel ordre juridique international (section II). Aujourd’hui, l’Etat n’est plus seul sur la scène internationale et l’individu commence même à bouleverser l’ossature d’une matière qui le considérait comme son objet en lui procurant des droits directement sans que son Etat ne fasse écran. D’ailleurs, cette configuration a des conséquences sur l’Etat (section III).

SECTION I : LA SOUVERAINETE : ELEMENT FONDAMENTAL DE L’ETAT

Aucun Etat n’aurait de vie sur la scène internationale en dehors de sa souveraineté ainsi que sur la scène nationale. Elle est le principe vital de l’Etat. Mais la souveraineté inhérente à la nature de l’Etat est restée implicite à l’apparition de l’Etat moderne. Elle s’est affirmée avec succès entre le XVIIe et le XXe siècle par l’apparition de nouveaux Etats issus de l’éclatement des empires[33]. Le Congo-Brazzaville concerné par ce mouvement se voit souverain pour être ou rester en vie. On va donc élucider cette notion par son évolution historique (§1) et sa consécration (§2).

§ 1 : BREF HISTORIQUE DE LA SOUVERAINETE AU CONGO

C’est par la France qu’on a connu la première théorie sur la souveraineté[34] digne de ce nom dès le XVIe siècle. Cette élaboration s’inscrit dans la perspective d’une autonomie politique vis-à-vis de la papauté avec les slogans : « le roi de France est empereur dans son royaume ». Mais on ne saurait appréhender la souveraineté au Congo-Brazzaville sans pourtant une analyse rétrospective de la vie politique sur l’aire dénommée aujourd’hui République du Congo.

A/ - La souveraineté dans la phase précoloniale

Il y a une déduction claire d’une analyse des théories abondantes sur l’apparition de l’Etat : c’est la souveraineté qui fonde l’Etat[35] moderne. En revanche, l’époque historique concernée est celle d’avant l’Etat moderne au Congo. Seule la religion est souveraine dans cette époque. En effet, celle-ci est dévolue au roi par transposition. Il est l’incarnation des dieux, le représentant légal des mânes. Le roi est souverain puisqu’il est sacré[36]. Il parle devant son peuple au nom de Mâ-Npungu[37] et des ancêtres. Le roi souverain détient un pouvoir qui n’a de contre poids que son cœur, le siège de l’Être Suprême et des mânes. C’est son cœur qui le pousse à demander conseil auprès du ministre du culte. Ainsi, il est souverain par le pouvoir qui lui est dévolu.

La souveraineté est, ici, synonyme de pouvoir. Dans ce sens, il peut être dévolu à un prince, à tout le peuple ou une partie de ce dernier[38]. Elle est une et indivisible. Cela se ramène à l’idée que le souverain est celui sans l’assentiment duquel il n’est pas d’idée de droit valable dans la communauté[39]. C’est le roi qui est la source du droit et délègue à certains membres de la communauté l’exécution de ses décisions dans tout le royaume. Le roi détient un pouvoir absolu sans partage. Mais ce pouvoir était encadré par une coutume connue par les seuls initiés, les notables et les membres de la cour royale.

Nous sommes dans une situation identique à la conception théologique de plenitudo potestatis attachée au pouvoir spirituel[40]. La souveraineté est un élement non négligeable, s’il faudrait la considérer sous l’aspect intérieur par lequel se révèle la puissance pour que certains hommes soient sous l’autorité d’un homme ou d’un petit groupe. En effet, la relation de subordination entre les hommes constitue la source principale de la cohérence sociale et le fait générateur de l’Etat moderne. Par ses différentes manifestations, la forme d’organisation des sociétés a subi des mutations au cours de l’histoire. S’il faudrait la considérer sous un aspect extérieur, on en déduira que la puissance doit exister pour que se forme un Etat[41].

Cette époque est jusqu’alors ignorée par les juristes[42]. Ce sont les historiens et les sociologues[43], voire les littéraires et les scènes de la vie courante qui se sont intéressés aux enjeux politiques de la phase précoloniale congolaise. On est même tenté d’affirmer que les différents royaumes dominant le territoire hérité par le Congo ainsi que la venue de deux explorateurs d’obédience différente[44] constituent une cause qui génère un comportement divergeant quant à la manière de concevoir le pouvoir. Mais aussi une source du comportement affiché par les populations au cours de la pénétration coloniale.

L’organisation du pouvoir est fondée sur une subsidiarité entre le roi et ses représentants au niveau des communautés constitutives du royaume. En effet, chaque communauté est sous l’autorité d’un chef apparenté[45] au roi. Celle-ci n’est que le résultat des chefs de famille à la recherche d’une localité propice pour l’émancipation de leur vie par l’appropriation des terres[46] sans chef, les terres sous l’autorité du roi mais n’ont point été reconnues comme propriété privée. L’appartenance des terres au roi justifie le tribut que tout membre des communautés devait s’acquitter annuellement par des présents de toutes natures auprès du roi, le souverain et garant de la sécurité des personnes. La nature de ces présents diffère en fonction de l’activité individuelle[47]. Le point de repère demeure le calendrier agricole. Ainsi, le foyer devra donner, par exemple pendant la récolte d’arachide, une petite partie de sa production au chef de la communauté et cela en forme de chaîne jusqu’au roi.

B/ - La souveraineté dans la période coloniale

La pénétration coloniale s’est faite sans violence. Le royaume se trouva à la fin du XVIIIe siècle dans une zone convoitée par les puissances européennes et les Etats-Unis d’Amérique pour un intérêt commercial. Cette région récemment découverte permit une prolifération des rapports commerciaux entre le Nord du contient[48] et la région de Zambèze par le fleuve Congo. Tous les comptoirs commerciaux de cette zone finirent progressivement par être la propriété de l’Association internationale du Congo. Cette dernière est devenue un Etat dont la reconnaissance ne fit pas l’unanimité entre les super-grands de l’époque. Déjà, elle fut reconnue souveraine en 1883 par l’Allemagne et les Etats-Unis d’Amérique, par un vote au Congrès, reconnurent sa souveraineté en avril 1884[49]. Cette zone fut à l’origine de deux conférences internationales[50]: celle de Bruxelles de 1876 et celle de Berlin de 1885.

Le roi est resté fidèle à la paix et comprit vite la faiblesse de son armée qui n’avait pas l’arme à feu, objet de discorde parmi les siens : certains la convoitent et d’autres non car ils en connaissent les méfaits. Cette attitude est témoignée par ses propos et comportement tenus devant de Brazza. Il lui envoya un émissaire dès qu’il fut entré pour la deuxième fois dans ses eaux territoriales par l’Ogooué. Son émissaire conduit cet explorateur devant le roi qui dit : « je te reçois dans la paix et la tranquillité car ces terres sont des terres de paix »[51]. Par la suite, il va conclure des traités[52] avec son hôte.

Au fur et à mesure que s’affirmait l’autorité du colon grâce à un abandon de Mâ-Koko[53] à l’égard d’un hôte qui n’avait pas la même culture que lui et qui n’était pas par essence censé vivre avec lui, on voyait émerger une dyarchie dans le royaume. Sur ce modèle, l’exploration débouchait sur un grand espace qui échappait au contrôle de la souveraineté royale. L’explorateur incorporait les territoires d’autres royaumes[54] dans son domaine d’action. Cela affaiblissait l’autorité du roi qui est remplacée par celle du colon, le vrai souverain. Ils entretenaient par conséquent des rapports non pas horizontaux comme au départ mais plutôt verticaux.

Les différents accords procurent un droit de propriété à De Brazza sur certaines terres. Par un « malentendu », le pavillon français est devenu le symbole du royaume pour le protéger contre tout ennemi. Tous les chefs de communautés reçurent l’information et durent se conformer à cette nouvelle mesure concernant l’installation du drapeau de la France de temps à autres dans leur cour, un vrai symbole de paix. Dans cette perspective, la souveraineté de la France prit le dessus sur celle du roi. Son chef de l’Etat est l’homme habilité à créer le droit[55]. Cette situation a mis successivement fin à l’ordre ancien et il en découle des conséquences[56] pour le Congo-Brazzaville ainsi que les autres colonies françaises.

La puissance de nouveaux arrivants est l’objet de contemplation et un don des dieux. Toute autorité dans le royaume est concurrencée par des commis de l’explorateur. Il est le symbole d’une nouvelle organisation de la société royale. Cette dichotomie prit une autre forme même avant l’accession à l’indépendance. C’est à un intérêt purement touristique que se situent les Mâ-Koko et Mâ-Loango aujourd’hui. Le nouveau souverain, c’est le chef du gouvernement, élu au suffrage universel, avant le transfert au Congo-Brazzaville de l’institution du président de la République par la métropole.

Mais la conception de la souveraineté nationale reste une fiction dans cet Etat ; la souveraineté est une illusion. La forme dichotomique concerne aujourd’hui les gouvernants et les gouvernés. A chaque catégorie, il y a une dichotomie entre les privilégiés et les non privilégiés ou entre le détenteur de la puissance et l’individu qui en est titulaire.

La « statogenèse[57] » de la République du Congo à l’image des autres Etats issus des territoires de l’Afrique équatoriale de l’empire français s’est faite par l’absorption du modèle français[58] à quelques exceptions près. Le Congo-Brazzaville reproduit la conception française de la souveraineté. Tout dirigeant fait référence à la souveraineté dans les discours internes ou non. Un discours associant souvent ce terme à celui de « l’indépendance ». D’ailleurs, la doctrine[59] parle d’une synonymie entre les deux mots.

§ 2 : LA CONSECRATION DE LA SOUVERAINETE AU CONGO

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La volonté de l’Etat, symbole de la souveraineté étatique, n’est pas restée seule et indivisible. En effet, le pouvoir dévolu à un parti et exercé par un seul individu a exigé une organisation de l’Etat par un principe de trilogie[60] en vertu des auteurs de décisions. Ce principe consacré pendant l’ère du marxisme-léninisme, appelé par le « socialisme scientifique », détermine l’association de trois couches de la société pour la prise des décisions de la Nation : les gouvernants, le syndicat et la représentation de masse populaire. La volonté de l’Etat est donc celle de ce trio.

En revanche, cette situation diffère pour ce qui relève de la politique extérieure. On associe le trio pour la gestion nationale dans l’Etat, où le peuple par rapport à la vie quotidienne est conscient de la réalité et apte à faire valoir son point de vue. Il en est différemment des questions internationales, domaine réservé du président de la République pour ne pas parler de l’Etat ; il exerce la souveraineté sur ce terrain animé par la « reconnaissance » et l’« effectivité ».

La théorie de la souveraineté serait illusoire dès lors que l’autorité de l’Etat n’est pas effective. Dans un Etat où ne compte que la volonté des gouvernants, on ne saurait parler de souveraineté. Cette dernière, associée à la notion de norme, signifierait que la souveraineté de l’Etat est l’expression du respect du droit. Les gouvernants agiraient conformément au droit car le rôle de celui-ci est d’être au service des hommes qui composent la collectivité[61]. Un droit au service des besoins de la population. Toutes les constitutions congolaises ont toujours consacré la sociabilité de l’Etat ; elles seraient en ce sens au service du bien être de la population. C’est donc un objectif que cet Etat est loin d’atteindre.

L’accession à la souveraineté internationale[62] de cet Etat est le fruit d’un processus motivé par la politique des années 1960[63]. La souveraineté est affirmée d’une façon négative à l’égard de l’ancienne puissance coloniale. C’est l’ébranlement de la communauté qui consacre la souveraineté de la métropole en matière internationale[64]. Le président du nouvel Etat hérite tous les attributs du président de la communauté[65]. La souveraineté est affirmée depuis l’indépendance dans toutes les constitutions[66] : un Etat souverain, indivisible, laïc et social. Mais, on ne doit pas rester dans la perspective de la doctrine internationale sur la souveraineté qui ne se contente que des aspects externes de celle-ci qui n’est en principe que le corollaire de l’aspect interne de la souveraineté[67].On peut faire remarquer sur le plan interne de la souveraineté l’existence d’une dégradation de trois éléments[68] qui expliquent la faiblesse de l’Etat ; une raison de la remise en cause de la souveraineté interne et la souveraineté externe. Mais tout cela constitue la souveraineté car cette division n’a qu’une valeur pédagogique pour un juriste[69].

Dans cet Etat, c’est le peuple qui est souverain. Cette souveraineté reconnue au peuple par le biais de la Nation est fictive[70]et le peuple ne possède pas des conditions d’exercice de cette puissance[71]. En effet, ce n’est pas la volonté du peuple qui s’exprime dans le processus de prise de décision. Le referendum est souvent utilisé au cas où les gouvernants ne semblent pas s’accorder sur un point. Ils ont recours à l’arbitrage du peuple. Même avec le système de « trilogie », le peuple n’a pas de voix car seul le parti unique qui dicte sa règle. Le peuple est donc marginalisé par des gouvernants.

En se référant aux éléments constitutifs de la souveraineté dans l’Etat, on en déduira l’atténuation de la souveraineté dont la faiblesse relève non seulement du procédé d’organisation administrative[72]mais aussi de la fidélité d’appartenance départementale primant sur celle de l’Etat[73]. Le pouvoir central est non assujetti à l’autorité de la loi. Les liens entre les agents de l’Etat et les gouvernants se fondent sur une logique de propriété privée, une attitude d’encouragement à la corruption[74]. Il y a une défaillance de l’Etat, même sur ses prérogatives prétoriennes, tel est le cas de la justice. Dès lors que les magistrats se trouvent dans une situation de trilogie et ont pour chef hiérarchique le chef de l’Etat assisté par un ministre de la justice, l’équilibre des pouvoirs en subit les conséquences. Cette trilogie est constituée autour de trois termes : espoir, crainte et affinité. Par conséquent, ils jugent contra legem.

Les juges ont peur des gouvernants et espèrent d’eux une promotion dont l’appartenance soit ethnique, soit partisane est le noyau dur de cette situation. Ils sont victimes de beaucoup de critiques après leurs verdicts sur une affaire donnée. Ces critiques proviennent des acteurs politiques et de la population qui ne voient pas en eux des professionnels du droit, représentant de la justice et par conséquent, des personnes en marge de la société disposant d’une neutralité. Ils les considèrent toujours comme des subalternes d’un groupe à partir des critères dépourvus de valeur objective. Par exemple, le lieu de résidence ou l’origine ethnique du juge peut en soi constituer la base de contestation de son impartialité ou neutralité. Les polémiques sur l’affaire[75] des disparus du Beach peuvent nous servir d’exemple. D’ailleurs, cela résulte des liens que les juges ont entretenus avec le parti unique.

Il se pose un problème d’effectivité de l’autorité de l’Etat. En effet, l’administration centrale est mal représentée sur toute l’étendue du[76] territoire. Cela découle sur une inégalité de déploiement des agents publics sur le territoire. Il y a plus de la moitié de ceux-ci dans la capitale politique et cette dernière ainsi que la deuxième ville se répartissent presque tout l’effectif de la fonction publique. L’Etat a du mal à faire exécuter ses décisions sur l’ensemble du territoire à défaut d’agents de relais. Ainsi, l’entité étatique fonctionne par intuitu personae.

Cette situation crée une nouvelle forme de légalité. Le contrôle de la légalité fondé sur la loi est dépourvu de signification. La loi reste étrangère à une collectivité territoriale qui se fie plus sur l’individu que sur la loi. Cette dernière est réservée aux initiés. Les membres de la collectivité jugent la valeur de leurs actes en fonction des individus, de nouvelles normes naissent du seul fait des comportements[77] des individus. Tous croient que ces normes constituent le droit positif. Il y a donc le contrôle de la légalité intuitu personae.

La question de la souveraineté, soulevée ici, concerne le dépositaire de l’autorité étatique. En effet, l’Etat a des organes qui reflètent sa puissance. On va chercher l’organe de la puissance étatique entre le gouvernement, le parlement et l’autorité judiciaire d’un côté et les conseils départementaux de l’autre. Cette question avait déjà été tranchée. Il s’agit d’en reproduire la solution : le gouvernement est l’incarnation de cette autorité[78]. Le gouvernement a une machine administrative à sa disposition dont le but consiste à mettre en œuvre une politique de satisfaction des besoins collectifs. Il doit exercer ses buts pour refléter cette puissance. Il y a une corrélation entre la puissance de l’Etat et ses buts[79].

Le gouvernement a du mal à faire asseoir son autorité. En effet, il lui manque une institutionnalisation administrative digne de ce nom. Les normes régissant l’Etat sont inconnues non seulement des agents de l’Etat mais aussi de toute la population. La publication difficile[80] par exemple du journal officiel ne permet pas que ses informations soient à la portée de tous. Même pour les arrêtés de nomination, les concernés sont dans l’obligation de se rendre à la direction des archives du gouvernement dès lors qu’ils sont devant un fait exigeant un tel acte. L’absence de centre de documentation notamment la bibliothèque nationale rend davantage difficile l’accès à l’information ; le non-regroupement des normes dans un recueil ou l’absence de mise à jour débouche sur une confusion causant l’ignorance des normes voire le risque de l’application d’une norme déjà abrogée.

La crise[81] politico-militaire de 1997 a aggravé cette situation. L’Etat est devenu un village grandiose où seul le chef par sa personne représente la loi, une volonté de tous les occupants de son village. Une telle hypothèse ne reflète même pas la réalité historique des bantous. Déjà, le village est un ensemble d’individus fixés sur un territoire avec des liens de sang. Le chef d’une telle communauté est à la fois chef de famille, du village et le représentant des mânes. En considérant l’Etat de la sorte, il perd sa souveraineté au profit d’un individu qui règne en maître absolu. Ce maître se voit au-dessus de toute chose et toute personne qui est proche de lui, est ipso facto dépositaire de l’autorité de l’Etat vis-à-vis de la population.

Par conséquent, une telle situation ouverte à la portée des acteurs internationaux de la société internationale dont leur nature différente produit des impacts non négligeables pour l’Etat entretenant des relations dans ladite société.

SECTION II : LA CONFRONTATION AVEC LE DROIT NOUVEAU

Le Congo-Brazzaville a un système juridique copié sur le modèle français. Il arrive sur la scène internationale avec la même vue du monde que son ancienne métropole à l’exception d’une contestation du droit constitué par des normes qui lui sont étrangères. En effet, l’apport des autres Etats pousse le Congo-Brazzaville à mener sa politique avec ceux dont sa situation est identique pour relever les défis du développement. Il se passe dans ce cadre amical beaucoup de négociations exposant les Etats à des situations de contrainte ou d’erreur dolosive, seule la participation à des organisations internationales peut pallier (§1). Mais la situation actuelle des membres de l’ONU tendant à accorder une attention particulière à la protection de la vie et tous ses corollaires ampute à cette entité étatique même sa puissance de décision (§2) causant des conséquences même substantielles à la vie de l’Etat.

§1 : L’APPORT DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

La prolifération des organisations internationales témoigne l’existence d’une menace réelle de la souveraineté dans une sphère où l’égalité entre Etats est une fiction des théories métaphysiques. En effet, l’ONU a servi de cadre pour que celles-là prolifèrent. Son assemblée générale est une tribune d’accusation des spoliateurs occidentaux. L’ONU institue des organes spécialisés pour répondre à ces besoins nouveaux puisque les populations au nom desquelles fut adoptée sa charte sont en situation de précarité, de misères, frappées par des fléaux de diverses natures. Il y a beaucoup d’organisations internationales à divers degrés et vocations dont seule l’ONU est universelle avec ses satellites constitués par des organisations subsidiaires et des programmes ; de nombreux programmes onusiens se sont institutionnalisés : tel est le cas du PNUD et du PAM.

A ces organisations s’ajoutent des personnes morales de droit national opérant dans le domaine international. Ces organisations ne sont pas constituées par des Etats sinon par des individus. Elles constituent une solution pour remédier aux différentes lacunes des organisations sus-indiquées dont la base de toute action est le consentement des Etats. La large place donnée à la souveraineté de l’Etat freine même leur fonctionnement car elles sont guidées par une idéologie de non-intervention dans les affaires intérieures de l’Etat. Cela explique le fait que l’ingérence démocratique de ces organisations est assise sur des accords[82] préalables entre l’Etat territorial et l’organisation.

Les organisations dites ONG sont en majorité au service des populations vulnérables notamment par la famine, les conflits armés ou la répression des dictatures de leur Etat territorial. Mais le statut international de ces organisations est jusqu’alors ambigu en dehors de celui du CICR dont le caractère de personne morale internationale est reconnu par tous les Etats membres de l’ONU. Il est, par son action, le gardien des conventions humanitaires[83]. Mais cette situation nous pousse à nous interroger pourquoi le gardien de ces conventions ne peut attraire en justice l’Etat qui ne les respecterait pas ? Est –ce que la neutralité suffit pour justifier l’inertie du CICR en la matière du moment que l’Etat helvétique a abandonné sa neutralité sur la scène internationale en devenant membre[84] de l’ONU ? Le CICR finira-t- il à endurcir une telle position dans un monde en perpétuelle mutation ? Ces questions ne seront pas abordées car elles n’ont aucun lien avec notre objectif.

La multitude d’OIG auxquelles la République du Congo participe aliènent sa souveraineté. Ce concept de souveraineté prend en quelque sorte une autre connotation. Ce n’est plus l’Etat qui est le centre de décisions. Les besoins de solidarité entre individus se situent dans une aire géographique qui échappe à l’Etat. L’organisation opérant selon ses but et objectif[85] sur cette aire est le lieu par excellence pour décider le sort des Etats y incluant les conséquences de ces mesures sur ses nationaux. Elle organise les rapports aussi bien verticalement qu’horizontalement. Mais ces organisations arrivent même à assurer une véritable tutelle et un contrôle sur l’action étatique dans leurs relations réciproques.

On peut se référer à l’action du FMI dont la définition de l’accord de confirmation[86] montre implicitement sa supériorité sur l’Etat. L’octroi des crédits nécessite de ce fait une assistance financière, un rééchelonnement de la dette et l’engagement des bénéficiaires quant au paiement, mesures de redressement et d’assainissement jugées nécessaires. Ainsi, le Congo-Brazzaville pour accéder à l’initiative PPTE fut l’objet de contrôles périodiques non seulement économique mais aussi administratif par des délégués du FMI qui ont même vérifié les écritures comptables de la SNPC.

En plus, le FMI et le gouvernement du Congo-Brazzaville ont signé un accord portant sur le programme de référence devant permettre à l’Etat de revenir après la suspension, depuis octobre dernier, de sa coopération due à une absence d’entente sur les recommandations du FMI sur l’orientation des crédits budgétaires d’investissement, d'ici la fin de l'année 2007, au programme appuyé par la FRPC. En effet, entre le 30 avril et le 9 mai 2007, une mission du FMI à Brazzaville est venue vérifier si les promesses tenues par le gouvernement ont été respectées. Une telle tutelle économique a eu pour conséquence par exemple la réduction du budget de l’Etat par rapport à l’année précédente : 1921 milliards 851 millions de francs CFA en 2006 contre 1376 milliards 907 millions de francs CFA (environ 2.099.100.390, 12 euros) en 2007. Ce budget en exercice depuis le premier janvier est réparti de la manière suivante : fonctionnement (816.022.000.000 de francs CFA), l'investissement (400.000.000.000 de francs CFA) et l'épargne budgétaire qui lui se fixe à la somme de 160.885.000.000 de francs CFA contre 613.254.000.000 de francs CFA du budget de l'Etat réajusté 2006.

En instituant une OIG, les Etats lui donnent une compétence fonctionnelle[87] à raison des missions qu’ils lui assignent. De cette fonction, l’OIG se voit investie d’une fonction délibérative découlant de sa capacité à édicter des normes[88], une fonction donc normative ; l’Etat transfère même sa diplomatie à ce sujet dérivé. Il gère toutes les questions relevant de ses compétences. Cela lui permet d’éviter les contraintes ou les erreurs auxquelles il peut être confronté dans une action unilatérale.

Dans ce sens, le traité de Brazzaville de 2005[89] attribue à une organisation la sauvegarde de faunes et de flores de la forêt équatoriale, une forêt occupant une partie des territoires du Congo-Brazzaville, de la République démocratique du Congo et le Gabon. Déjà au Congo, elle couvre toute l’étendue du territoire septentrional. Cette organisation coopère avec d’autres OIG ou Etats afin d’atteindre ses objectifs et buts. Elle mène une diplomatie qualifiée d’ « institutionnelle[90]».

D’une manière générale, certaines OIG peuvent infliger des sanctions aux Etats. Celles-ci concernent d’un côté les sanctions corporatives qui atteignent l’Etat membre par exemple recommandation faite à l’Etat de verser une certaine somme au budget de l’OIG sous peine d’une suspension du droit de vote. Il y a d’un autre côté, les sanctions disciplinaires qui privent souvent l’Etat les avantages résultant de la qualité de membre. C’est le cas de l’ONU, dans un contexte différent, qui a même des sanctions disciplinaires désignées par l’expression des « mesures coercitives impliquant l’emploi de la force[91] » et des « mesures coercitives n’impliquant pas l’emploi de la force[92] » en cas par exemple de non respect par un membre de l’obligation de non recours à une contrainte armée dans ses relations diplomatiques.

Aujourd’hui, cet Etat n’a aucun pouvoir de décision en matière commerciale. L’entrée en vigueur du traité[93] de l’OHADA a rendu le Congo-Brazzaville impuissant pour édicter toute norme concernant le commerce. De même, il uniformise son tarif douanier[94] avec tous les Etats membres de la BEAC depuis 1964. L’OHADA, en matière commerciale, suspend la souveraineté de tous les Etats africains membres à majorité issus soit de l’AEF, soit de l’AOF. Les Etats se contentent de transposer les actes de l’OHADA dans leur ordre respectif. Elle a même une juridiction permanente pour connaître en cassation tout différend concernant les Etats parties et les entreprises qui investissent dans ces Etats[95]. Ses normes sont d’applicabilité immédiate ; tous les Etats sont contraints de s’y conformer.

Elle relève de la vétusté des lois dans la zone franc CFA où la majorité d’instruments datent de 1907 et 1925. Bien que ce soit une loi de 1992 qui encadre le commerce dans la République du Congo, l’écart est énorme entre la réalité des activités commerciales et la loi. La loi ne fait qu’actualiser les sanctions et les prix des actes prévus dans les lois coloniales relatives au commerce ; elle ne dit rien à propos du statut de commerçant. D’ailleurs, il y a plus d’actes de commerce dans le secteur informel, secteur que l’Etat devait mieux encadrer pour générer des revenus supplémentaires ainsi qu’assurer la sécurité juridique des personnes concernées par ce secteur.

Or la culture des normes exogènes contribue à l’affaiblissement d’une prise de décision rationnelle dont l’objet serait l’encadrement des enjeux interindividuels. Ainsi, l’Etat devait venir en aval des besoins[96] nés dans les relations des citoyens.

Par ailleurs, le panafricanisme des partis africains d’obédience gaulliste ou de la SFIO fut considéré comme la voie royale par laquelle la souveraineté serait recouvrée. Le premier président congolais entreprit des négociations avec ses homologues issus de l’AEF pour enrichir une telle solidarité voulue par la métropole d’une part et soutint l’idée d’une organisation africaine où chacun participerait dans toute liberté au dépit de celle qui consisterait à une limitation de la liberté, une fédération au sens du terme.

Ce mouvement au lieu de répondre à son objectif a fini par aliéner l’autorité des Etats due à une divergence d’intérêts ainsi qu’à la bureaucratisation des institutions issues du mouvement, voire une tutelle vis-à-vis d’autres organisations soit extrarégionales comme l’UE, soit l’ONU à l’instar du PNUD qui, par exemple, assure l’administration et la gestion financière des ressources de l’OHADA. Ainsi, il y a une tutelle[97] des OIG régionales qui a des conséquences sur les Etats parties.

Tous les Etats issus de l’éclatement de l’empire français restent au lendemain des indépendances partagés sur ce point à témoin. Par conséquent, les uns deviennent souverains tout en participant à la communauté tandis que les autres n’y participent plus jusqu’ à ce que la communauté disparaisse en pratique en 1963 lors du changement de la dénomination du secrétariat de la communauté par ministère de la coopération dû aux exigences de la conjoncture car l’OUA venait déjà de voir jour.

L’OUA devait aider les Etats à se faire entendre dans une société internationale qu’ils venaient d’intégrer. Ils étaient conscients du caractère fictif de leur souveraineté. Il ne faudrait plus dépendre de la métropole sinon former un groupe pour s’entraider[98]. Cette aide, malheureusement, provient toujours de la métropole, un travail effectué en vain car le résultat n’est pas au rendez-vous. Ainsi, de Gaulle exprima le fait que laisser les territoires africains se gouverner ne signifie pas que nous devons les abandonner, (…) mais nous devons les aider.[99] Cette aide aujourd’hui est même la source principale de la dépendance des Etats comme le Congo-Brazzaville.

Le pouvoir central est assis sur des notions traditionnelles de chefferie. Les chefs de clans ont une autorité non contestable mais que le droit positif refuse de reconnaître. Or la pratique révèle que les gouvernants entreprennent des rapports étroits avec cette catégorie d’individus dans la société. Les notables ou sages des départements sont des chefs coutumiers dont l’autorité n’est pas contestée parmi les siens, individus originaires de ces départements. Cette perspective fait apparaître une tendance de leur part à être instruits sur le plan international pour qu’ils en parlent dans leur département. Les populations sont plus soumises à leur autorité qu’à celle du pouvoir central qui est l’apanage d’un individu et non celui du peuple.

Le gouvernant n’a une autorité que pour servir les intérêts particuliers car le peuple qui est représenté par ses députés trouve dans ces gardiens de sa liberté et de ses droits des hommes s’intéressant vivement à leur propre position et à celle des membres de leur famille (…). Toutes les institutions, l’armée, la marine, la gendarmerie, la police et la fonction publique, dépendent des ministres[100] qui s’approprient le gouvernement. Ce constat fait depuis deux siècles est encore d’actualité dans beaucoup de « pays sous équipés ». Les gouvernants répercutent sur les organisations internationales le même mépris que celui dont ils sont victimes sur le plan national. Les autres gouvernements sont aussi qualifiés de même dès lors qu’ils entretiennent une coopération avec le gouvernement méprisé. Ainsi, le peuple ne voit aucune justice dans ces organisations.

Toutes les organisations internationales auxquelles le Congo-Brazzaville participe sont considérées par la population comme des Léviathans censés approfondir les difficultés de la vie quotidienne. Quel profit trouve-t-il par exemple pour l’OMS ? Cette organisation embellit l’image externe de la République[101]. Les gouvernants ont tendance à attribuer la source de l’inefficacité administrative aux résolutions de ces organisations comme la CEMAC, les institutions de Brettons Wood, l’UA…

Or, c’est la non-effectivité de la puissance étatique qui constitue la source de cette faiblesse ainsi que le mépris des populations. Cette dernière ne voit aucun avantage à ces organisations. Toutes les contributions annuelles de l’Etat constituent un moyen de dilapidation des deniers publics. Ce sont des organisations considérées comme injustes dont le fonctionnement fondé sur la non-ingérence dans les affaires intérieures entraine une tendance consistant soit à défendre un régime oppresseur, soit à défendre les intérêts des Etats du Nord placés dans le Sud. Tel est le cas de l’intervention de la MONUC ou la position de ces institutions dans la gestion de la crise ivoirienne. Ces organisations reflètent la politique de certains Etats membres de l’ONU bénéficiant d’un statut favorable à l’affirmation de leur hégémonie au sein du groupe des autres Etats membres.

Les principaux obligations et droits des organisations internationales qui se résument à deux niveaux sont des preuves supplémentaires de la diminution progressive de l’autorité de l’Etat sur la scène internationale : d’une part le jus tractus et d’autre part le jus legationis.

a)- Le jus tractus : Les organisations internationales ont le droit de conclure des accords internationaux. Elles se substituent aux Etats membres et complètent leur action. Dans la poursuite de leurs objectif et but, ces organisations concurrencent l’Etat. Tous les accords passés par elles ont des répercutions sur l’Etat membre. Mais il faut distinguer une nuance à ce niveau avec le cas où l’on parlerait d’une substitution à l’action de l’Etat[102] soit permanente comme c’est le cas pour les mesures relatives aux ressources propres de l’Union européenne, soit provisoire tel est le cas de l’administration provisoire des territoires par l’ONU : Namibie entre 1967 et 1990 et le Kosovo depuis 1999.

b)- Le jus legationis : Elles ont le droit d’entretenir des relations avec les Etats membres par l’existence d’une représentation diplomatique réciproque[103]. Les Etats sont en face d’une nouvelle entité qui coopère avec eux dans le respect du droit positif. Ils sont tous égaux à condition que le sujet dérivé ait compétence en vertu de sa spécificité ou même c’est le sujet dérivé qui semble prendre la supériorité sur l ‘Etat comme en témoigne l’ONU en matière de maintien de la paix, la seule entité compétente pour décider des mesures impliquant l’emploi de la force ainsi que la qualification d’un acte d’agression armée.

§ 2 : LA PROLIFERATION DES NORMES SUR LES DROITS DE L’HOMME

On assiste aujourd’hui à une grande vague d’adoption d’instruments internationaux portant protection des droits de l’homme[104]. Ils édictent des normes que l’Etat, même non partie, s’approprie dans son ordonnancement. Ce mouvement est complété par une autre variété de ces droits de l’homme mise en mouvement lors des conflits armés. Ils constituent une menace pour l’Etat qui se voit invoqué à son égard d’un instrument qu’il n’a pas accepté pour motif d’humanité[105]. Il convient de nous pencher sur les droits de l’homme et le droit humanitaire ; un droit antérieur à l’arrivée du Congo-Brazzaville sur la scène internationale.

A/ - Les droits de l’homme dans le constitutionnalisme congolais

Le Congo-Brazzaville est un Etat par tradition respectueux des droits de l’homme. La politique occidentale de l’écriture fondée sur une philosophie des droits de l’homme d’égalité de chance pour tous dont l’individu est le centre a changé sa conception bantoue des droits. La population réalise que tous les hommes naissent libres et égaux. Personne n’a le droit inné de commander sur les autres car le pouvoir de commandement est une conséquence d’un mérite individuel et non l’héritage.

Cette nouvelle conception révolutionne l’état d’esprit tout en débouchant tantôt sur la négation des droits de l’homme, tantôt sur des crises « patrioticides » pour la lutte au pouvoir. Les différentes constitutions dès 1964 ont posé explicitement le contrôle socialiste de la légalité. Ce système nie les droits mêmes sacro-saints à la culture des peuples de la région notamment la liberté de croyance.

Par ailleurs la disparition de l’URSS a plongé l’Etat dans une fiction de protection des droits de l’homme par l’institution d’un contrôle de constitutionalité des lois à la française[106] qui ne fonctionna pas pendant 5 ans (1992-1997) ainsi que la voie d’exception pour l’inconstitutionnalité ne joue presque pas (depuis 2002).

La cour constitutionnelle est presque une juridiction du gouvernement. La commission nationale des droits de l’homme reste l’unique organe constitutionnel qui n’a pas encore intégré son local faute de travaux. Un organe étatique peut-il protéger les droits de l’homme dès lors que cette notion est larvée du « politisme » ? Cette question renvoie aux conditions de recrutement des agents de l’organe qui mettront en exergue son indépendance ainsi que la qualité de son pouvoir.

Malgré l’adhésion ou la ratification des traités ou pactes internationaux[107] portant protection des droits de l’homme, la République du Congo ignore encore la portée d’une telle notion. Toutes ses normes de lege lata en la matière sont peut-être les mieux adaptées au droit positif de la communauté des Etats membres de l’ONU ainsi qu’en témoigne son bloc de constitutionnalité ; son droit en la matière est la reproduction des instruments internationaux.

Mais l’inefficacité de l’autorité de l’Etat sur l’étendue du territoire national entérine la violation des droits de l’homme. Déjà, le département du Pool est le berceau de violation de ces droits par les Nsilulus[108] et les FAC.

B/ - Les normes de droit humanitaire

Ce domaine est encore peu répandu. Les conflits internes connus dans le territoire au lendemain du rétablissement du pluralisme ont ouvert la voie à une immixtion humanitaire. Les ONG ont trouvé là une chance pour implanter des représentations afin de répondre aux nouveaux besoins des personnes en situation de nécessité et le PAM à l’instar du PNUD est devenu de plus en plus actif. Le Congo s’ouvre à un devoir d’assistance humanitaire, un devoir accepté aux dépens du droit d’intervention humanitaire que l’Etat assimile au néo-colonialisme dès 1965.

En revanche, cette conception est partagée par presque tous les Etats du Sud qui voient en cette tendance une violation des principes sacro-saints de l’ONU en l’occurrence celui de l’égalité souveraine de tous ses membres qui a pour corollaire la rencontre de volonté et non l’imposition de la volonté d’un seul pour des motifs d’humanité ou de menace de la paix.

Les actions entreprises au cours de cette dernière décennie par certains Etats du Nord témoignent la violation du droit souverain de l’Etat sur son territoire et même celui du peuple à disposer de lui-même, donc à organiser ses institutions en toute liberté. La question de l’action militaire de l’OTAN en ex-Yougoslavie ou celle des Etats-Unis en Iraq en sont des exemples.

Tous les Etats[109] du Sud dans leur ensemble rejettent le soi-disant « droit » d’intervention humanitaire qui n’a aucun fondement juridique dans la charte de l’ONU et dans les principes généraux du droit international. Ils confirment que l’assistance humanitaire doit être entreprise stricto sensu dans le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique des Etats concernés et qu’elle ne peut être déclenchée qu’en réponse à une demande et qu’avec l’approbation de l’Etat concerné.

Cette conception constitue une réponse à la nouvelle perspective des relations interétatiques qui se développe progressivement depuis le déclin de l’empire soviétique. Or dans le monde où nous vivons, chacun a horreur du vide. La mono-polarisation des rapports diplomatiques conduit à la recrudescence de l’ingérence quel que soit le qualificatif joint à ce concept. On parlerait dans ce sens de l’ingérence humanitaire, ingérence économique, ingérence démocratique… Il y a donc des ingérences auxquelles les Etats sont soumis de nos jours sous différentes formes.

Face à ces pratiques non consenties par l’Etat concerné ainsi que son dessaisissement de ses compétences internes, l’Etat sous certains cieux est un concept creux car il est vidé de sa substance. Le droit international a apporté des instruments qui font de certaines entités stricto sensu des Etats et d’autres des Etats lato sensu. Son système de financement des économies étatiques en difficultés[110] et l’encadrement des exportations constituent de jure l’ébranlement de l’égalité entre Etats[111]. Par conséquent, le Congo-Brazzaville est vidé de son essence ; l’Etat est déshabillé de ses nombreux attributs.

SECTION III : LE DEPOUILLEMENT DE L’ETAT

Le Congo-Brazzaville est un Etat dépouillé non seulement de l’intérieur mais aussi de l’extérieur. En effet, la crise de l’autorité de l’Etat débouche sur une technicité économique dont l’Etat ne peut supporter le poids (§2). Ainsi, il voit progressivement ses compétences limitées (§1).

§1 : LA LIMITATION DES COMPETENCES TRADITIONNELLES

Le protestas jure conféré ou reconnu par le droit à l’Etat de connaître d’une affaire, de prendre une décision, de faire un acte ou d’accomplir une action est un droit réel puisqu’il porte sur son territoire[112] comme un droit de propriété qui a des limites dues à des transferts de propriété. Les limites sont intervenues de façon concertée à l’instar de l’initiative de PPTE sollicitée auprès des institutions de Brettons Wood. Cette concertation, d’une certaine façon, peut aussi s’appliquer pour sa compétence personnelle, droit inhérent à l’Etat.

L’Etat a du mal à mettre en exergue sa compétence territoriale. En effet, cette compétence est l’assise par excellence de sa souveraineté, conçue comme une compétence exclusive de l’Etat sur l’ensemble de son territoire. Ce principe a été affirmé avec force par Max Huber[113] dans sa sentence d’arbitrage du 4 avril 1928 entre les Etats-Unis d’Amérique et les Pays-Bas dans l’affaire de l’Iles de Palmas : la souveraineté dans les relations entre Etats signifie l’indépendance. L’indépendance relativement à une partie du globe est le droit d’y exercer, à l’exclusion de tout autre Etat, les fonctions étatiques… Et le territoire est le point de départ du règlement de la plupart des questions qui touchent aux rapports internationaux.

Le vase de ses compétences se rétrécit également par la non-effectivité de la puissance publique. Cela a pour conséquence parmi tant d’autres l’applicabilité des lois étrangères au Congo-Brazzaville sur les matières auxquelles le législateur ne s’est pas prononcé. Le juge y applique la loi française[114] au motif que tout le système de l’Etat n’en est que le prolongement. Le système juridique français est pour le Congo-Brazzaville ce qu’est l’âme au corps.

La survie de la coutume semble prendre le dessus sur le droit dans un Etat où l’expression d’ « une société de droit[115] » est inusitée. La loi matrimoniale par exemple n’est pas respectée et l’Etat ne prend aucune mesure pour soit conformer la loi aux exigences du temps, soit sanctionner les irrégularités en vue d’assurer l’autorité de la loi. La loi est un Léviathan car ce qui compte c’est l’ordre ou la volonté de la personne dépositaire d’une autorité de l’Etat. Toute personne dénonçant une injustice sociale ou une illégalité de la loi par le biais de la presse est censée être du côté des ennemis de la révolution ou du peuple, voire contre le président de la République.

Ces diverses appellations renvoient aux différents régimes qui se sont succédés dans l’histoire de cet Etat. Pendant la présidence du MNR toute personne d’une telle attitude par exemple est un ennemi du peuple et ennemi de la révolution sous celle du PCT avant d’être considérée comme ennemi du président de la République au lendemain de la transition pour la démocratisation.

Il est vrai que toute autorité fondée sur l’individu n’est qu’une domination de l’homme pour son détriment. Cette situation compromet la maîtrise exclusive de l’Etat de sa compétence traditionnelle en dehors de l’état actuel du droit international qui ôte continuellement à l’Etat sa compétence sur l’individu[116]. Cela se comprend à partir du processus d’institution des tribunaux pénaux puisque le droit pénal était longtemps considéré comme une compétence interne[117] des Etats.

Dans cette même optique, il se voit amputé de son immunité de juridiction dans certaines affaires tantôt économiques tantôt criminelles. Pour le dernier cas, elles concernent les crimes de guerre commis par les FAC dans le conflit[118] du Pool. Une action judiciaire était ouverte en France dont le demandeur se fondait sur le lieu de résidence de l’un des présumés coupables. Cette affaire a eu une portée médiatique susceptible de plusieurs interrogations étant donné que toutes les actions dégradantes réprimées par les conventions de protection des droits de l’homme[119] peuvent être connues par les juridictions des Etats parties à ces conventions.

§2 : LE POIDS DE LA CONJONCTURE ECONOMIQUE

L’action économique des Etats est anéantie au profit des acteurs privés ou publics, le cas des OIG, car l’Etat est censé fausser le jeu du fait des monopoles publics, situation délicate qui appelle déjà des transformations du droit public[120]. L’Etat doit se plier aux exigences des institutions qui encadrent ce secteur pour une collaboration concertée au préalable. C’est ce qui explique la collaboration des Etats de l’UE avec la Commission européenne.

Mais l’importance attachée par l’Etat au secteur économique suscite souvent des conflits soit d’intérêt, soit dans l’exécution des engagements. Par exemple la définition du contrat de concession en droit français se dilue dans un ensemble plus large du droit communautaire dont la concession est l’équivalent du marché public[121]. Ces aspects rentrent dans les contrats de partenariat public-privé.

Or les partenaires privés en l’occurrence les entreprises multinationales qui investissent dans le Sud se trouvent dans une situation identique de conflit d’intérêts débouchant sur des concurrences déloyales. Celles-ci sont occasionnées par l’impuissance de l’Etat due à une mauvaise structuration de son économie.

Ces Etats en majorité « sous-équipés » connaissent les mêmes difficultés économiques par l’absence d’une maîtrise de la nouvelle technologie, d’une législation appropriée et des capitaux. L’absence d’une législation pouvant guider l’Etat dans la conclusion de contrats avec les entreprises privés étrangères va l’affaiblir davantage[122]. Cette faiblesse le met dans une situation d’infériorité[123] dans la négociation des accords sur le plan international ou national[124].

La Cour suprême, dans un avis relatif à un accord international, a culpabilisé le gouvernement au motif que c’est sans procédures définies qu’il a renoncé à plusieurs reprises, dans ses engagements internationaux, à ses immunités de juridiction et d’exécution[125]. Cette action décriée par la haute Cour résulte de l’incapacité d’édicter des normes, une impuissance d’ordre juridique. La renonciation à de tels privilèges du droit positif sans réserve dénature l’Etat qui pourrait être assujetti à des lois commerciales étrangères[126].

La renonciation à l’immunité de juridiction et d’exécution consacrée par la convention de Vienne[127] est aussi critiquée par la doctrine[128]. Le mauvais état de l’administration ne permet pas une prise de position pour pallier cette lacune. Déjà, le parlement est une chambre d’enregistrement des décisions du gouvernement. La proposition de loi reste la propriété des constitutionnalistes dès lors que les législateurs ne disposent pas des moyens techniques similaires à ceux du gouvernement.

Mais les accords commerciaux entre deux acteurs ou sujets de droit international sont régis par des clauses de droit international économique et ont pour objectif la sécurité ainsi que la stabilité des investissements. Il peut s’agir de la clause de stabilisation ou de celle du traitement de la nation la plus favorisée. Seulement les clauses contractuelles vouées à d’autres fins ne doivent pas être admises car elles sont préjudiciables à l’Etat concerné.

L’infériorité de certains Etats dans les rapports internationaux n’est plus un tabou car elle est reconnue par les Etats concernés[129], la doctrine[130] ainsi que le droit positif[131]. Elle est plus opérationnelle sur le plan économique et militaire. Les revendications par les Etats de leur souveraineté sur leurs ressources et richesses naturelles[132] viennent confirmer cette position. Elle est même une preuve irréfragable de la différenciation des Etats car il n’y a égalité qu’en politique étant donné que chaque voix compte pour un, pour le vote des Etats lors des conférences diplomatiques ou pour les citoyens lors des élections. Mais la différenciation des situations légitime les inégalités[133]en économie.

Les multinationales ont des pouvoirs non seulement financiers mais aussi technologiques qui limitent la souveraineté des Etats dans lesquels elles s’installent et leurs activités dans ces Etats échappent à l’emprise de leur Etat d’origine[134].Leur domination sur ces Etats fait penser à une nouvelle forme de colonialisme[135]. Elles affirment leur autorité sur le marché international et national où les accords sont négociés en vertu du profit avec un avantage implicite accordé librement aux multinationales car elles sont la convoitise des autres Etats. Le déficit de développement engendre beaucoup de pratiques illicites dont la responsabilité est partagée entre l’Etat et ses partenaires.

L’ONU reconnaît l’incapacité des Etats à avoir une emprise sur leurs ressources naturelles sans l’apport des capitaux et de la technologie. La rareté de ces éléments justifie la montée de l’hégémonie des entités qui les importent. Le Congo-Brazzaville, producteur de pétrole, n’a pas une maîtrise de l’industrie pétrolière. De ce fait, il ne peut discuter sur un pied d’égalité avec ses partenaires privés, opérateurs pétroliers.

Il n’a pu ni confirmer ni infirmer les niveaux de réserves avancés par l’opérateur, cocontractant, demandant aux dépens de l’Etat la révision des termes économiques et financiers de l’accord à raison de la baisse des resserves pétrolières[136] qui avaient servi de base à l’évaluation technique lors des négociations. L’Etat ne peut en soi déceler une opération de surinvestissement dès lors qu’il ne maîtrise pas la technologie.

Cette situation explique les difficultés rencontrées par l’Etat avec son principal partenaire pétrolier. En effet, il réclame à Total/Fina/Elf une enveloppe de près de 500 milliards[137] de dollars US après la découverte d’une pratique frauduleuse à laquelle s’est livré le groupe dans l’exécution de ses obligations. Ce groupe par son pouvoir financier est un agent déterminant dans le processus d’édiction[138] des normes puisque les revenus pétroliers assurent près de 80 % des ressources du budget de l’Etat.

Il a même été accusé par l’opposition d’avoir apporté son soutien aux troupes angolaises[139] qui ont envahi la capitale économique du Congo-Brazzaville en faisant accoster leur navire de guerre sur ses installations de Djéno. Mais ce constat témoigne du poids qu’exercent les multinationales dans des Etats « sous-équipés » dont les caractéristiques sont les mêmes pour tous les nouveaux Etats[140].

En définitive, l’Etat ne peut prétendre revendiquer sa souveraineté si celle-ci n’est pas menacée. Les relations entre Etats ne sont que le reflet de celles des individus fondées sur les rapports de force. Or toute personne en position de force tend toujours à en abuser en vue de maintenir cette position. Si la République du Congo, Etat nouveau, est confronté à des difficultés techniques, politiques, juridiques et économiques en dépit de sa richesse naturelle, c’est parce que les gouvernants tiennent au maintien du statu quo. Ils gardent la vision des concessionnaires sous la colonisation qui se sont intéressés à exploiter le territoire sans pour autant le mettre en valeur[141].

La politique de l’autorité unique incorporée dans la vie de l’Etat congolais diminue progressivement la puissance de l’Etat qui s’expose à des pressions de deux ordres : internes par les rebellions ou les insurrections et externes par la corruption des multinationales consolidant leur acquis ainsi que le changement du paysage politique international tendant à infléchir la souveraineté, situation qualifiable de miracle dès lors que l’Etat est justiciable[142].

Mais pour éviter d’être anéanti sur une scène internationale où la triade, l’axe Japon-Europe occidentale-Etats-Unis d’Amérique, règne en maître incontesté, l’union des Etats faibles de la même nature que le Congo-Brazzaville est la voie de prédilection pour assurer sa survie et faire entendre sa voix. D’ailleurs, l’union fait la force.

Cette situation effraie les Etats économiquement forts qui de leur coté se ressaisissent encore de la souveraineté pour une contre offensive dans une société des Etats membres de l’ONU dominée quantitativement par les Etats de situation identique à celle du Congo-Brazzaville. Ainsi, les Etats-Unis, dans leur volonté d’étouffer le traité de Rome constituant la cour pénale internationale, se sont tournés avec des propositions de toutes sortes vers ces Etats afin qu’ils ne ratifient pas ce traité.

CHAPITRE II : LA SOUVERAINETE SAUVEGARDEE

La République du Congo est en voie de conjuguer ses efforts avec d’autres Etats qui ont des ambitions similaires aux siennes. Depuis la disparition du bloc socialiste[143], beaucoup de mouvements[144] ont perdu leur force. La teneur et la vivacité de ceux-ci prenaient une tournure dégressive du jour au lendemain dès la décennie 1980. La globalisation dont les cycles de Tokyo et d’Uruguay[145] étaient un vecteur d’ouverture des marchés a pris une autre posture à l’heure de la « gouvernance » d’Internet. Les Etats sont de plus en plus rapprochés dans un monde où le pouvoir de l’information prend son ascension sans précédent dans l’histoire de l’humanité.

Les notions comme « les frontières » sont devenues des notions sur lesquelles s’appuie la mondialisation. Est- ce pour dire qu’on est dans un « Etat universel » à l’instar de la conception kantienne ? Les hommes sont toujours identiques quelle que soit leur origine[146] ou couleur. Les gouvernements acceptent pour le bien-être de leurs gouvernés de libérer leurs frontières à des flux de biens et de personnes en provenance d’autres territoires. Cette perspective ouvre la voie à une nouvelle solidarité pour concurrencer les Etats en détention du monopôle économique et politique.

Cette concurrence prend pour point de repère le système américain soit en admettant l’organisation d’un tel système, soit en la récusant. Les Etats fournissent des efforts dans ce sens ainsi que d’autres acteurs et sujets de droit international qui voient les méfaits d’une organisation de la société internationale fondée sur la puissance d’une seule entité. Cette puissance n’est pas contestée[147] de la même manière par tous les Etats de la société internationale car elle est une potestas de facto.

Certains autres Etats forment des groupes d’entités régionales pour faire face à la nouvelle donne de la politique internationale de peur d’être broyés par ce grand géant qui en compagnie de ses satellites s’affirmerait peu à peu comme l’autorité sans l’assentiment[148] de qui aucun droit n’est possible pour la société.

Tout cela se ramène à deux interrogations : primo, on peut se demander quelles sont les stratégies à mettre en œuvre pour un Etat comme le Congo-Brazzaville afin de participer de facto comme de jure sur une scène internationale davantage mondialisée. Et secundo, une autre question porte sur la valeur du mimétisme normatif hérité de la métropole ainsi que son impact sur une toile où chacun aimerait apporter son file. Pour répondre à ces interrogations, il serait mieux d’analyser successivement la problématique de la survie du Congo-Brazzaville (section I) puis le modèle étatique dominant dont l’apogée témoigne son adaptabilité adéquate aux enjeux majeurs d’aujourd’hui (section II).

SECTION I : LA SOUVERAINETE DANS LA SURVIE DE L’ETAT

Les menaces sur la souveraineté prennent leur source dans la faiblesse de l’Etat qui n’arrive pas à s’adapter à la nouvelle donne par une mauvaise conception des acteurs politiques. Ces derniers ne s’intéressent qu’à résoudre les difficultés d’aujourd’hui, c'est-à-dire en militant pour les projets de l’immédiateté. Ces projets qualifiés de « projets à court terme » ne pallient pas les difficultés car il faut les exécuter du jour au lendemain et surtout la politique de la nouvelle caste se contente du ventre. Mais la primauté du droit international sur le Congo-Brazzaville pose un fondement (§1). En partant de ce postulat, il en résultera des observations (§2).

§1 : LE FONDEMENT DE LA SURVIE DE L’ETAT

L’Etat est considéré comme un ensemble constitué d’un groupe humain assis sur une aire géographique déterminée et ayant une autorité centrale, ce qui est qualifié de monopole de la « contrainte légitime[149] ». Ce faisant, il a l’obligation d’harmoniser les rapports entre ses trois composantes ainsi que celles des autres Etats qui partagent la même histoire que lui. Les gouvernants se voient ouverts vers l’extérieur pour bénéficier de la légitimité en vue de mener une action pour le développement. Il y a donc un infléchissement dans la conception de la souveraineté[150] au Congo-Brazzaville entre la période du « socialisme-scientifique » et celle d’après la conférence nationale souveraine.

A/ - L’harmonisation horizontale et verticale des rapports

C’est en toute souveraineté que le Congo-Brazzaville organise minutieusement les rapports de ses composantes. On assiste prima facies à une volonté des gouvernants consistant à pratiquer une politique de « municipalisation accélérée » dans le cadre de l’aménagement du territoire[151] en vue de réduire les écarts de niveau de vie entre les deux principales villes et le reste de l’Etat. Déjà, la répartition inégale de la population sur l’étendue du territoire national impose de nouvelles orientations pour permettre au gouvernant de bien assurer la sécurité des biens et des personnes dans une République affaiblie par des conflits et dont les armes sont illégalement détenus par presque toutes les couches sociales. Par exemple, le vol à main armé couramment appelé « braquage » est le vol le plus répandu à Brazzaville depuis la fin des hostilités de juin-octobre 1997.

Ensuite apparaît d’un côté le problème identitaire. Les différents groupes linguistiques ont développé des liens affectifs avec les lieux plus restreints que le territoire, ceux concernant les traces du passé sont relégués au second plan. Cette attitude s’explique par le fait qu’il n’y a pas des lieux de mémoire que sont les monuments et toutes les formes d’expression architecturale ou artistique liée à une culture. Par ailleurs, ces lieux, s’ils existaient, peuvent susciter de nombreux problèmes dès lors que les groupes ethniques résidants ne sont pas ceux qui s’identifieraient à cet héritage à l’instar de la dispute israélo-palestinienne sur la ville de Jérusalem ou celle des Albanais et Serbes au Kosovo.

Toute l’histoire du Congo-Brazzaville, d’un autre côté, se construit autour des personnages, devenus des héros, qui par leur sagesse et leur bravoure ont marqué les consciences populaires. Les marxistes-léninistes regrettent leur doctrine d’usurpation de l’histoire d’un peuple qui se fondait sur le changement du point de départ de l’histoire nationale sur tous les plans. Cette lamentation conduit à une reprise de conscience pour redéfinir mais surtout encadrer tous ces personnages qui ont joué un rôle primordial dans le processus d’édification d’une nation congolaise.

Si l’Etat en occident est le fruit d’un cheminement de plusieurs siècles où la nation précède l’Etat, le Congo-Brazzaville est dans une logique contraire[152]. En effet, il n’y a toujours pas une nation derrière chaque Etat et une nation peut exister sans un Etat à l’instar de la Palestine. Le processus de construction de l’Etat congolais est sans exception celui suivi par tous les Etats extra-européens. Ce faisant, le Congo-Brazzaville fut d’abord une société d’économie[153], celle-ci proche de celle instituée en Amérique du nord, avant de devenir une société politique. Cette société d’économie est longtemps restée sous la direction des exploitants miniers et agricoles. Mais ces derniers exercent un pouvoir stricto sensu féodal, une force utilisée à l’encontre des autres qu’ils traitent en esclavage. Un pouvoir pareil n’a pas pour fin la construction d’un ordre stable sur un vaste territoire.

Cette force a permis aux concessionnaires d’exploiter par le biais du travail forcé les ressources. Tout le monde a pris conscience des conséquences que cela a provoquées sur les populations dans tous les départements. Les politiques sont conscients que le pouvoir ne peut voir le jour que si les hommes se réunissent en vue de l’action et il disparaît quand, pour une raison ou pour une autre, ils disparaissent et s’abandonnent les uns et les autres (…). Quand des hommes réussissent à conserver intact le pouvoir jailli entre eux au cours d’une action particulière quelconque, c’est qu’est déjà engagé le processus de fondation par lequel ils constituent un édifice stable[154]. Dans cet ordre d’idées, ils prônent la cohésion sociale car le pouce ne lave jamais le visage[155].

Le tribalisme caché fait que chaque gouvernement est composé en fonction des clivages ethniques[156]. C’est une représentation géo-ethnique qui est pratiquée lors de la répartition des portefeuilles ministériels afin d’intéresser toutes les sensibilités à l’action gouvernementale. Tous les efforts menés par l’élite sur cette question finissent par se révéler inefficaces du moment qu’ils ne s’intéressent pas à prendre le mal à sa racine. Pourquoi tout citoyen aspirant à une fonction représentative tend-il toujours à s’appuyer sur sa terre d’origine ?

Cette question constatée au Congo a aussi une valeur pour beaucoup d’autres Etats comme la France. Est-ce pour autant dire que le tribalisme a une origine politique ? La réponse à cette question ne peut être que positive car ce concept né de la tradition romaine renvoie à une certaine organisation administrative de l’empire. Mais ce qu’il faut bannir ce sont les abus de la manipulation humaine assise sur les tribus[157].

L’autorité centrale combat toujours toutes les formes de coutumes qui constituent en soi une source de tribalisme ou de haine à cause d’une opposition acharnée entre clans. Une loi pénale de 1962 réprime par exemple la coutume téké qui consiste à balafrer toute leur progéniture. En effet, la présence des balafres sur le visage d’un Congolais est à l’origine de la rupture du principe d’égalité entre citoyens. Personne ne peut ignorer l’appartenance ethnique d’un tel citoyen balafré puisque la langue n’est plus un critère déterminant pour justifier l’appartenance ethnique d’un individu dans un Etat où certaines langues[158] ont dépassé leurs limites géographiques.

Les mariages inter-claniques sont encouragés et le code de la famille congolais n’autorise l’opposition des parents au mariage de leurs enfants que pour des motifs légitimes reconnus par le procureur de la République et une loi de 2005 proscrit tout parti politique fondé sur des considérations ethniques. Mais le retard enregistré pour la consécration et la promotion pratique des droits individuels et collectifs constitue le principal handicap afin d’atteindre les résultats souhaités.

Enfin, face à une caste au pouvoir qui ne satisfait pas les attentes des gouvernés, les populations constatent les dommages d’une mauvaise gouvernance. Cette attitude consolide davantage les liens de solidarité entre les différentes catégories et composantes ethniques avec plus de compassion à l’égard des populations de la même entité linguistique que le gouvernant incarnant l’autorité de l’Etat. C’est à tort que certains croient que toutes les personnes appartenant à l’ethnie de ce gouvernant tirent profit du gaspillage des deniers publics. Tout le monde réalise que les gouvernants constituent une autre forme d’ethnie qu’il faut bannir. Il naît donc une autre forme de tribalisme entre l’ethnie-gouverné et l’ethnie-gouvernant.

Par ailleurs, les faiblesses d’une jeune République poussent l’Etat à consentir à de nombreux transferts de souveraineté sur des matières qu’il n’arriverait jamais à gérer seul. Ces transferts sont à l’origine d’une harmonisation verticale des rapports parce que ce ne sont plus ses sujets qui sont la cible de telles mesures nouvelles mais ceux des Etats de la sous-région.

Le transfert de compétence à une institution supranationale ne tue pas la souveraineté mais au contraire renforce celle-ci en vue de résister à d’éventuelles immixtions de diverses natures dans les affaires intérieures de l’Etat. Si l’Etat consentit à une intervention extérieure dans sa sphère d’action, ce n’est pas de l’ingérence sinon de la coopération. Celle-ci est animée par des raisons qui justifient des transferts de souveraineté à l’instar de la réalisation de l’unité politique dans l’Union européenne[159].

Les faiblesses d’un Etat en construction suscitent la politique d’institution des unions politico-économiques. En effet, Le Congo-Brazzaville a connu les bienfaits de cette politique à l’époque de l’AEF où il était associé à la CEE[160]. Cette politique a persisté jusqu’alors. Elle favorise la coopération dans la sous-région entre les Etats voisins constitués par des peuples parlant les mêmes langues. Cela a conduit à de nombreux accords bilatéraux et plurilatéraux entres eux. Par exemple les deux Congo (Congo-Brazzaville et Congo-Kinshasa) disposent d’une police commune chargée d’assurer la sécurité entre les deux rives du fleuve Congo et ils ont consacré une libre circulation des personnes entre les deux capitales politiques : Brazzaville et Kinshasa.

La panoplie de ces instruments d’harmonisation des relations sous-régionales souffre d’une absence d’effectivité due à la non-réalisation des mesures d’accompagnement. Les textes sans support permettant leur application sont de simples meubles d’ornement. C’est ainsi que la liberté d’aller et venir des personnes ainsi que des marchandises reconnues aux ressortissants de la CEMAC dans le territoire des Etats membres est un rêve. Elle est toujours ignorée par tous car certains Etats membres exigent aux ressortissants des autres Etats un visa pour entrer dans leur territoire.

L’absence d’infrastructures rend davantage illusoire l’expression de cette liberté. D’ailleurs, les voies de communication constituent la majeure difficulté pour les citoyens des différents Etats membres de jouir d’une liberté pareille. Seules les Brazzavillois et les Kinois jouissent d’une telle liberté car les citadins de ces deux villes par l’augmentation du trafic traversent le fleuve sans contrainte consulaire.

Il est vrai que les relations entre ces Etats que sont le Congo-Brazzaville, le Gabon, le Tchad, la Centrafrique, le Cameroun…visent à renforcer la sécurité des régimes en place. Elles relèguent les populations au second rang. Les gouvernants se contentent d’ harmoniser davantage le traitement dont bénéficient les groupes des multinationales opérant dans la région puisque les agents de ces groupes ont le droit de circuler librement dans cet espace.

Déjà l’exploitation pétrolière rapproche plus le Congo-Brazzaville, le Gabon et l’Angola étant donné que cette activité menée en ZEE se trouve concentrée dans des zones inter-frontalières non seulement qui échappent au contrôle des Etats mais également où les agents des filiales des Multinationales installées dans les Etats concernés peuvent travailler sur la même plate-forme.

La méfiance de certains gouvernants vis-vis de ceux relevant des Etats en instabilité corrobore leur volonté de durcissement des conditions de séjours dans leur Etat. De ce fait, le Congo marxiste ne saurait admettre l’interpénétration des peuples dont les gouvernants sont des marginaux de l’impérialisme. Cela est illustré par sa volonté et son soutien accordés au MPLA pro-marxiste dans le processus de l’indépendance de l’Angola. De même le Congo-Brazzaville et le Bénin ont conclu un accord[161] d’établissement que l’Etat n’a pas encore conclu avec un autre Etat de la sous-région ni même pour les ressortissants des autres Etats membres de la CEMAC. Aussi la politique d’intégration des Etats de l’ancienne AEF diffère-t-elle de celle de l’AOF.

Le développement des voies de communication et la suppression des frontières dans la CEDEAO permettent la libre circulation des personnes et des biens. En effet, il y a des routes bitumées liant les grandes villes des Etats membres. Déjà, les commerçants congolais vont à Accra et à Lomé via Cotonou par camion ; ce trajet n’est pas possible dans la CEMAC. Les populations de cet espace sont plus dépendantes les unes des autres pour des raisons historiques et géographiques. On peut citer la crise ivoirienne pour exemple dès lors qu’elle a un des impacts sur les populations des Etats voisins comme le Burkina Faso.

On se rend finalement compte que la politique de l’harmonisation des relations entre gouvernants se dilue dans une politique d’estime pour bénéficier du soutien des autres Etats membres de l’ONU. Elle est un objet de mesure pour bénéficier de la confiance de cette communauté des Etats en prônant même une coopération judiciaire pour une démocratisation durable ainsi que la pérennisation de la justice. La justice ne serait pas juste si elle restait l’apanage d’une seule entité.

B/ - La légitimité démocratique

Le processus de démocratisation lancé après la conférence nationale au Congo-Brazzaville souffre encore de ses mauvais fondements[162]. Cette démocratisation revêt une forme différente de celle adoptée par le Gabon ou le Bénin pendant la période transitoire de 1991-1992. Il faut admettre que le concept de « démocratie » est présent dans le langage politique congolais comme c’est le cas dans d’autres Etats d’obédience socialiste comme les ex-Républiques dites « démocraties populaires » de l’Europe orientale et centrale ou bien encore au Gabon ou dans l’ex-Zaïre.

En revanche, cette démocratie populaire ne connaissait pas la contradiction d’idées. Elle consacrait une religion d’Etat qui était l’idéologie marxiste. Les instructeurs étaient répartis sur l’étendue du territoire pour instruire les jeunes pionniers afin de pérenniser les valeurs du « socialisme-scientifique ». Cela avait pour conséquence des élections présidentielles à candidat unique et législatives à liste unique qui, en réalité, furent des consultations de renouvellement de confiance. Le chef d’Etat en sa qualité du président du parti n’était pas susceptible d’être élu en dehors du parti.

C’est le parti qui dirige l’Etat. Par exemple, le parti unique zaïrois faisait une propagande inlassable sur les mérites d’être dirigé par un seul parti, avoir un seul président parce que toute personne n’a qu’une mère et est soumise à l’autorité d’un seul Dieu Créateur tout le long de sa vie. Il y avait aussi des situations spécifiques dans l’ordonnancement des normes, par exemple la charte du parti avait une valeur supra-constitutionnelle[163]. Ainsi, lors des consultations populaires, il y avait un seul bulletin : c’était le bulletin rouge pour le Congo ou vert pour l’ex-Zaïre.

Mais les choses ont changé aujourd’hui. La démocratie plurielle fondée sur un multipartisme est la règle d’or dans les relations internationales. Ce mouvement en faveur de la démocratie s’accompagne d’initiatives normatives qui incitent à évoquer la naissance d’un principe de légitimité qui impliquerait au terme de son progrès que seuls soient légitimes, au regard du droit international public, les régimes de démocratie libérale[164], fondés sur le respect des droits de l’homme et sur des processus électoraux libres et transparents . Dans cet ordre d’idées, les Etats du Sud qui critiquaient l’injustice[165] dans ces relations subissent les mêmes critiques de la part des Etats du Nord. Ces derniers ont incorporé dans leur politique d’aide au développement la protection des droits de l’homme qu’avaient défendue les Etats du Sud[166] au sein de l’assemblée générale de l’ONU.

Les Etats Membres de l’Union européenne ont affirmé une telle volonté[167] dans le cadre de leur nouvel instrument encadrant les échanges UE / ACP. Comme l’avait déclaré le professeur Pinheiro devant l’assemblée paritaire ACP-CE réunis à Luxembourg en 1997 : je dirais que Lomé IV, tel un grand navire, poursuit un parcours en vue duquel elle a été conçue (…), tandis que l’on s’apprête à mettre en service une nouvelle alimentation en énergie et de nouveaux instruments de pilotage (…). Cette nouvelle alimentation concerne la prise en compte d’une dimension politique[168] dans le cadre de l’accord du 23 juin 2000 conclu au Bénin entre ces différents sujets. Mais cela est une conséquence de la prise en compte des libertés et droits fondamentaux dans le cadre institutionnel du marché commun européen qui n’avait pas incorporé cet aspect dès sa formation.

La dimension politique concerne les modalités d’alternance au pouvoir, le multipartisme, la bonne gouvernance, le respect des droits de l’homme, etc. Cette perspective est celle de l’Europe occidentale qui avait accordé une place au principe de légitimité démocratique au sein de la CSCE. Le CE exige la démocratie au lendemain de la seconde guerre mondiale[169] et le premier Protocole additionnel à CESDH adoptée en 1952 recommande aux Etats parties d’organiser des élections libres et périodiques. Il en résulte que la communauté des Etats dans son ensemble est favorable à la consécration des droits et libertés fondamentaux dans tous les Etats[170] ; le renforcement et l’extension de la démocratie sont affirmés.

Les bases du droit international ne sont pas remises en cause par ces faits. Il y a le respect du consentement des Etats qui ont souverainement admis ce virement dans leurs rapports avec l’UE. Par conséquent, la démocratisation prime la souveraineté de l’Etat[171] dans leurs relations réciproques. Ne pas admettre la démocratie est le revers même de la souveraineté.

Les élections ont été longtemps laissées dans l’indifférence par un droit international[172] victime de la guerre froide, qu’elles aient eu lieu ou non, qu’elles aient été ajournées ou non, authentiques ou libres, qu’elles aient été frauduleuses ou viciées. D’ailleurs, le Congo-Brazzaville ne saurait admettre une surveillance de ses élections dans son passé. Une telle vision s’est modelée sur les avancées du temps.

Le principe des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes est, en effet, incontestablement étranger à la question de savoir si l’exercice de ce droit à l’autodétermination doit conduire à un Etat démocratique[173]. Mais la volonté de doter un Etat des institutions démocratiques est admise aujourd’hui et les Etats s’y conforment comme si cela était du droit. Cette pratique pourrait faire apparaître une coutume dans le droit international public. Par exemple, tous les Etats qui ont reconnu le gouvernement de Brazzaville en octobre 1997 réclamaient le rétablissement des élections démocratiques.

Il sied de faire remarquer que l’organisation des élections est aujourd’hui l’instrument de mesure de la démocratie. Chaque fois que l’on parle des élections, on parle de l’état défectueux ou non de la démocratie dans un Etat à l’instar des erreurs survenues dans les élections présidentielles des Etats-Unis en octobre 2000. Tout le monde a parlé des faiblesses de la démocratie américaine. Cela vaut aussi pour les élections nigérianes d’avril 2007 qui se sont déroulées dans la violence.

Or la démocratie devrait se mesurer à partir d’un fuseau d’indices qui tourne autour des droits de l’homme car être dirigé par une autorité choisie n’est que l’expression d’une des libertés reconnues à tout citoyen, membre d’une société organisée. Ainsi, on pourra facilement dénicher les « démocratures[174] » dans les Etats comme le Congo-Brazzaville ou ailleurs.

Le constitutionnalisme de promotion des droits et libertés fondamentaux à l’occidentale déferle sur la scène internationale avec une force sans précédent. Tous les Etats adoptent des constitutions avec des principes d’économie libérale, c‘est à dire qu’ils insèrent des normes du marché reconnues par tous. Chaque entité étatique se dote des constitutions par voie référendaire. Elles s’étalent sur un modèle présidentiel implicite ou explicite, pour ce qui est le cas des Etats africains francophones. Il y a une évidence. En se dotant des règles occidentales d’organisation des prérogatives publiques, l’Etat est vite admis par les grands clubs financiers. Il devient un partenaire transparent et privilégié car les relations internationales sont aujourd’hui animées par des expressions comme « conditionnalités » et « ajustement structurel ».

Cela étant, la démocratisation ne peut se construire à petit feu comme en Occident mais elle doit être accélérée. Par conséquent, elle devient un bien universel pour tous. Aucun Etat ne peut s’en démarquer. Mais de telles pratiques finissent par engendrer plusieurs difficultés[175] dans l’intériorisation des valeurs importées et mal adaptées ou différentes des valeurs africaines.

La démocratie congolaise titube encore et elle est lion de s’affirmer. Les constitutions successives du Congo populaire reconnaissent que la République populaire est un Etat démocratique[176] et travailleur. Elle a pour devise : démocratie- travail- progrès. Cette perspective d’une démocratie verbale reste toujours la règle d’or de nos jours. En effet, les deux dirigeants les plus populaires sur la scène politique ont scellé un accord pour une majorité présidentielle au cours des élections législatives de cette grande saison sèche (cet été) 2007. Ce sera le PCT et le MCDDI qui gouverneront ensemble ; la coalition URD- FDU est ressuscitée après neuf ans d’exil du président fondateur du MCDDI. C’est une situation qui rappelle les accords de 1963 conclus par les différents états-majors des trois partis politiques[177] les plus représentatifs, source des « trois glorieuses » du 12 au 14 août 1963.

Mais tant que les intellectuels des territoires décolonisés qui ont importé la démocratie n’arriveront pas à concilier la pratique culturelle de l’exercice du pouvoir et les principes démocratiques exogènes, il n’y aura pas de progrès politique, social et économique. Les valeurs occidentales ne sont pas les valeurs orientales. Une telle différence impose une prise de conscience de masse tout en privilégiant les valeurs endogènes[178]. Déjà, la culture de la palabre[179] sur laquelle se fonde la juridiction traditionnelle africaine est l’exemple type à ne pas ignorer dans les potentialités des mœurs de ces territoires. La médiation judiciaire consacrée en France fonctionne de la même façon que la palabre puisque le but est de concilier les parties, de parvenir à une solution à l’amiable.

D’ailleurs, les gouvernants congolais comme leurs homologues africains restructurent leur Etat pour plaire et donc, avoir de l’estime à l’extérieur. Tout cela mérite quelques remarques en vue de bien appréhender la situation justifiant de telles bases chères aux Etats au XXI è siècle.

§2 : OBSERVATIONS SUR CETTE CONSTATATION

Dans la conception moderne de l’Etat souverain, l’Etat n’est pas une entité libre dans son organisation interne comme l’a prétendu la doctrine[180] au lendemain de chaque guerre mondiale. La nouvelle lecture des textes, en l’occurrence la charte de l’ONU, entraîne des bouleversements considérables quant à l’autorité des Etats de défaire tout ce qu’ils ont fait. Sur ce point, on trouve les lacunes des théoriciens de l’autolimitation[181] des compétences de l’Etat.

L’Etat est libre d’admettre les droits qui lui soient opposables, il l’est aussi pour tous ces droits qu’il n’a pas consentis. L’introduction du principe de la majorité dans l’adoption de certains textes internationaux ouvre la voie à une construction de la société des Etats qui est loin d’être à l’âge de sa majorité. C’est ainsi que s’expliquent par exemple les débats entre les défenseurs de l’intervention humanitaire dans un Etat et les défenseurs de la primauté de la Charte[182] dans les rapports interétatiques.

La disparition de l’URSS a permis l’encouragement, voire la prise en charge par l’Occident de la démocratisation de l’Afrique. La démocratie n’est plus un sujet tabou sur le continent car les liens personnels entre les différents chefs d’Etat africains et ceux du bloc capitaliste ne sont plus identiques à ceux de l’époque des blocs. La durée illimitée de leur mandat et surtout l’absence du pluralisme sont décriées. Est- ce pour dire que l’Afrique était déjà mûre[183] pour importer la démocratie plurielle après l’effondrement du mur de Berlin ? Il est vrai que les conférences de démocratisation dans les Etats qui sont des « scandales géologiques[184] » ont été des échecs. L’importation de cette démocratie est la cause directe de beaucoup de conflits sur le continent puisque dans beaucoup d’Etats le dialogue a fait défaut[185] ou bien c’est le chef d’Etat lui même qui a régné en maître souverain tout le long des plénières de la conférence.

La souveraineté longtemps reconnue à des mouvements de libération nationale grâce aux droits des peuples à disposer d’eux-mêmes n’a plus de valeur dans une région où tous les peuples sont décolonisés. Alors, pourquoi ne pas admettre une telle souveraineté au profit des mouvements nationaux en lutte contre la tyrannie face à une ingérence démocratique qui s’affiche avec acuité ? A l’heure actuelle du droit, admettre une solution pareille consiste à renoncer à la sécurité internationale et aussi à encourager des conflits intra-étatiques, objet pour une éventuelle prolifération des trafics illicites des armes et source d’appauvrissement, voire des conflits territoriaux[186].

La crise soudanaise au Darfour illustre l’inertie d’une intervention internationale dont le système égalitaire reconnaît aux seuls cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU le droit de décider les normes applicables devant un cas de violations des droits de l’homme. Ce diagnostic résulte du profit à tirer dans chaque action car la norme juridique par son attachement à un environnement social semble inintelligible dès lors qu’elle n’est pas associée à la sociologie[187], la seule science mieux adaptée à interpréter le texte la contenant.

La mondialisation est un facteur très opérationnel dans la légitimité démocratique. En effet, les lois du marché, de la concurrence ainsi que le pouvoir médiatique et celui de nouvelles techniques de communication contribuent à un ajustement structurel répondant aux exigences contemporaines. Le Congo-Brazzaville est sujet à de tels flux auxquels aucun Etat ne peut se soustraire. Toutes les productions doivent avoir accès au marché international, lieu par excellence d’échanges des matières premières en capitaux nécessaire au développement.

Dans ce contexte, aucun Etat ne veut s’isoler. Mais la poursuite des profits par les Etats prouve comment les différents Etats en s’appuyant sur leur égalité souveraine utilisent leur position de force pour s’imposer dans un tel système de chose. Pour certains, ils appuient sur leur puissance[188] économico-militaire[189] tandis que d’autres se fondent sur leur majorité[190]. La question d’adhésion de la Chine populaire à l’OMC nous fournit un exemple puisque les Etats du Nord craignaient l’arrivée d’une Chine ne respectant pas les normes de l’OIT et donc est susceptible pour arracher des débouchés ainsi que de voir leurs multinationales s’y installer grâce à une main d’œuvre bon marché, propice à une meilleure génération des bénéfices pour les Multinationales.

Mais tout cela tend vers une universalisation d’organisation des Etats à laquelle le Congo-Brazzaville n’échappe pas. En ce sens, l’Etat moderne est celui qui se conforme à ces principes qualifiés de « civilité internationale[191] ». D’où, une décentralisation des compétences de l’Etat qui associe le fédéralisme.

SECTION II : LE MODELE ETATIQUE DOMINANT

Tous les Etats unitaires d’Afrique francophone et aussi lusophone prônent une politique de centralisation (§1). Celle-ci n’est pas un partage de compétence car les moyens financiers susceptibles de réaliser une telle entreprise restent concentrés entre les mains du gouvernement. Mais cette organisation administrative de l’Etat débouche sur une constatation d’un retour de l’Etat fédéral, modèle qui s’universalise (§2) après que la doctrine[192] ait annoncé à tort la crise du fédéralisme suite à la perestroïka.

§1 : LA DECENTRALISATION DE L’ETAT : UNE POLITIQUE APPROPRIEE

Le Congo-Brazzaville est un Etat unitaire décentralisé. La vision politique de la décentralisation admet que certains intérêts locaux ont un caractère spécifique[193] et doivent s’exprimer parallèlement à l’intérêt général ou national exprimé par les organes de l’Etat. Si en France la décentralisation est soit territoriale, soit technique, on est loin de cette logique. La décentralisation au Congo-Brazzaville s’est faite autour de deux étapes.

La première étape fut celle de la décennie ouverte par la CNS. Les lois de 1994 et 1997 organisaient un transfert de certaines compétences du gouvernement aux collectivités locales qui sont constituées par les régions et les communes. Chaque collectivité disposant d’un organe de décision et d’exécution. Mais seule la commune exerçait ses fonctions sous lesdites lois parce que l’Etat n’avait pas pu organiser les élections régionales, ni accompagner ces mesures des finances appropriées.

La seconde étape concerne les lois prises sous la transition flexible de 1997 à 2002 qui ont substitué le département à la région tandis qu’une loi de janvier 2002 modifie la division administrative en augmentant le nombre de départements. L’Etat compte aujourd’hui 12 départements.

Il apparaît des difficultés dans l’exercice des attributions de certains conseils départementaux dues à une confusion de mission entre le conseil municipal et celui du département à l’image des départements de Pointe-Noire et de Brazzaville car le même conseil possède un double visage et une double fonction qui pèseraient aux contribuables. Ce conseil est à la fois le conseil municipal et départemental comme le conseil de Paris. Mais la décentralisation permet à l’Etat d’assurer son effectivité sur tout le territoire dans un Etat où l’autorité des chefs coutumiers est plus respectée que celle de l’Etat.

Il reste que l’autonomie d’action dont bénéficieraient les personnes décentralisées n’affectera pas l’unicité de l’Etat dans la mesure où ces collectivités territoriales demeurent sous la tutelle de l’Etat, c’est à dire un contrôle exercé par ce dernier et voient leurs compétences définies sans garantie de durée par le législateur. Ce contrôle au lieu d’être en principe a posteriori est a priori. Il se confond de ce fait avec le contrôle hiérarchique d’un Etat déconcentré. Ces collectivités territoriales ne disposent pas de moyens financiers, humains et matériels susceptibles de permettre leur réelle autonomie pour gérer les intérêts locaux. Par exemple elles ne disposent pas de ressources propres sauf les communes qui ont une fiscalité et parafiscalité pour financer leur budget toujours avec l’aide de l’Etat.

D’une manière générale, la décentralisation est l’une des pratiques les plus fréquentes pour réformer la « gouvernance[194] ». C’est une gestion participative, rationnelle, efficace et transparente de l’Etat ou de toutes autres structures. On ne saurait transférer, en théorie, autant le pouvoir et les responsabilités aux échelles les plus bas de l’administration afin que cela soit bénéfique au développement des populations notamment les plus pauvres.

Pour cela un certain nombre de conditions doivent être remplies. Le pouvoir doit être effectivement transféré au niveau local au lieu de l’être pour la forme aux officiels locaux. En plus, l’administration locale ou territoriale doit être plus proche de la population ainsi que plus réceptible à ses besoins que l’administration centrale. En effet, quoique plus proche du peuple, l’administration locale peut être ou non une nouvelle source de gaspillage des deniers publics. Pour éviter toute éventualité de dilapidation des deniers publics, il faudrait non seulement mettre en place un système qui obligera à rendre compte mais aussi avoir une société civile bien structurée et forte. Il s’agit donc de mettre au point un système qui encourage l’amélioration des institutions de la gouvernance locale aux fins du développement ; le renforcement des capacités en matière de gouvernement local est nécessaire.

La contribution à la démocratisation des collectivités territoriales est bien souvent négligée car l’Etat lui-même peine à s’adapter à cette logique. Or une telle hypothèse serait positive pour la réussite par exemple des programmes de réduction de la pauvreté qui ne cesse de s’accroître sans précédent dans l’histoire de ce petit « émirat[195] ». Il faut que les collectivités locales rendent compte de la gestion de leurs fonds. Mais si l’Etat se détourne de ces questions et que les populations locales ne sont pas concernées, il est probable qu’une élite locale s’emparera de la collectivité. Un résultat pareil rend les individus désabusés à l’égard des avantages que la décentralisation offre en tant que réforme favorable aux populations dans un Etat souverain de nos jours.

C’est dans cette perspective que s’inscrivent une évaluation récente réalisée dans huit (8 ) Etats du Sud par des programmes du FENU et une série d’études de cas sur la décentralisation réalisées par la division du renforcement de la gestion et de la gouvernance du bureau de la politique du développement du PNUD[196]. Elles fournissent des exemples parlants de la reforme en faveur de la population au niveau des collectivités locales. Cette approche s’articule autour des points suivants :

1. La participation communautaire aux fins de l’amélioration des services ;

2. La promotion de la gouvernance participative au développement participatif au moyen d’un fond d’initiative locale pour l’environnement urbain ;

3. Le renforcement des capacités d’intervention des communautés.

La République du Congo se doit d’appliquer ces dispositions afin d’apporter des solutions aux difficultés liées à la qualité du processus d’édictions de normes, faculté par laquelle tout Etat est considéré souverain. Dès lors que cette faculté est fractionnée entre des personnes différentes autres que l’Etat lui-même, se pose la question de savoir si ce processus suffit pour faire de l’Etat une entité souveraine. Aujourd’hui les collectivités territoriales en France par exemple peuvent édicter des normes qui abrogent la loi dans une durée de temps limitée[197], voire même l’Etat peut consulter par referendum les populations locales pour une mesure portant sur la délimitation[198] de leur collectivité territoriale. Elles ont par conséquent le droit de se prononcer sur un texte législatif, même si cela étant à un titre expérimental, ce qui affectera déjà l’unicité dans l’applicabilité de la norme sur le territoire, une situation identique à un Etat fédéral. De telles pratiques illustrent la concentration des pouvoirs constatée dans l’Etat fédéral de nos jours tandis que l’Etat unitaire les déconcentre par dilation. Cette situation permet de rapprocher l’Etat unitaire et l’Etat fédéral.

Le fédéralisme[199] longtemps évoqué en droit des gens est aujourd’hui le système par lequel la pratique d’organisation de la société tend de plus en plus vu l’organisation interne ou externe du pouvoir dans la société.

§2 : L’UNIVERSALISATION DU FEDERALISME

Le fédéralisme a été pratiqué dans l’histoire par les anciennes civilisations et il est attribué aux efforts d’Asante Hene en Afrique. L’organisation du royaume Ashanti[200] amorçait le pas du fédéralisme avant même la constitution américaine de 1789, suite au pacte de Philadelphie du 17 septembre 1787, n’institua le premier Etat fédéral moderne organisé de la manière suivante selon les lois de Georges Scelle: la superposition, l’autonomie et la participation. C’est l’absence de ces trois composantes qui a causé des difficultés à l’Union française ainsi qu’à la communauté instituée respectivement par les constitutions françaises de la IV è et de la V è République.

Dans cette qualité d’Etat, les compétences de l’Etat sont partagées entre les différentes entités territoriales qui composent l’Etat. C’est la constitution qui en règle générale reconnaît toutes les compétences non attribuées à l’Etat fédéral aux entités fédérées[201]. Celles-ci sont appelées différemment dans le droit positif de l’Etat concerné. Par exemple, ces entités territoriales sont des « Länder » en Allemagne, des « Etats » aux Etats-Unis d’Amérique ou au Nigeria, des « Provinces » en Afrique du Sud, … Mais cette diversité terminologique ne peut affecter cette spécificité dès lors que toutes les lois la gouvernant sont réunies. C’est d’ailleurs le cas de la Suisse dont la dénomination de « confédération » n’est plus adaptée.

Tous les Etats qui transfèrent leurs compétences à d’autres entités, personnes de droit public se rapprochent de cette forme d’Etat. En effet, un Etat unitaire décentralisé présente déjà de facto une superposition parce que chaque collectivité territoriale possède un organe de décision, une législature en miniature ; il ne connaît pas l’autonomie ni la participation. Mais, la nouvelle organisation décentralisée en France se rapproche d’une autonomie. D’ailleurs, on passe par étape de l’Etat unitaire à l’Etat régional qui a pour paroxysme l’Etat fédéral.

Le fédéralisme est une organisation politique qui permet de maintenir sous l’autorité politique des ensembles très vastes le plus souvent ayant des races, langues ou cultures différentes. Appliqué à l’Etat, il concerne une collectivité humaine assise sur un territoire au sein duquel l’autorité politique est fractionnée et dépendante d’une autre autorité politique centrale. Ce qui voudrait dire que dans cet Etat, seule l’autorité centrale est souveraine[202] ; celle-ci a la qualité d’un sujet de droit international ayant des droits et devoirs. La politique internationale est donc le domaine réservé de l’Etat souverain[203]. Par conséquent, la qualité de sujet de droit international reconnu à la Biélorussie et à l’Ukraine se justifiait par le nombre des entités étatiques souveraines que l’ex-URSS voulait compter dans son bloc pour posséder un contre poids pour contrer la majorité du bloc capitaliste au cours d’adoptions des textes dans les conférences diplomatiques.

Les défenseurs[204] de la souveraineté de la société internationale s’appuient sur une telle organisation en vue de mettre au point une société plus active à mener ses missions de paix et de sécurité internationale. En effet, une société n’étant pas organisée comme dans l’ordre national aura de la peine à imposer la sécurité par défaut d’une institution permanente garante de l’ordre public comme les forces publiques dont disposent les Etats. En ce sens, Raymond Aron voyait déjà dans la voie de la fédération planétaire la même voie que celle de la paix par le droit. La démarche décisive serait l’abandon du droit de se faire justice soi-même, c’est-à-dire de ce qui a été et de ce qui est encore l’essence de la souveraineté[205] en droit international.

Il faut remarquer que le droit international n’a pas une procédure déjà définie par laquelle une entité viendrait à acquérir sa personnalité comme dans l’ordre national. Si les Etats ont des procédures d’acquisition de la personnalité morale dans leur droit positif, cela est différent sur la scène internationale. Par ailleurs, les OIG ont une souveraineté attribuée par les Etats en vertu de leurs but et objectif mais les entités étatiques accèdent à cela suite à une indépendance[206] suivie d’une reconnaissance.

L’immédiateté internationale constitue un critère à prendre avec modération dans la gestion des collectivités décentralisées et fédérées puisqu’il y a des accords de partenariat entre ces collectivités par exemple le département de la Vendée et le Bénin ou la commune du Havre et celle de Pointe- Noire dans la République du Congo. Une coopération entre ces entités de l’Etat est nécessaire dans un monde où les peuples sont plus rapprochés par le flux de mondialisation, de l’Internet qui dépasse les frontières comme si ce globe se ramenait à un seul Etat polyglotte. Mais il peut être évoqué seulement pour des relations entre Etats car il concerne les droits et devoirs découlant des conférences diplomatiques qui touchent directement l’Etat.

Certains actes de souveraineté que Jean Bodin[207] énonce sont aujourd’hui hors de la compétence de l’Etat unitaire pour intégrer celle d’un ordre supranational ou international que l’Etat lui-même a institué. C’est le cas de l’Union européenne qui a le monopole de la politique dans son cadre de compétence propre et qui jusqu’alors milite pour s’approprier aussi le monopole de la politique internationale car cette OIG sui generis est la seule à avoir des institutions démocratiques élues par les populations concernées qui sont des citoyens européens. Une telle logique de nature fédérale « transforme de plus en plus (…) les Etats européens en de simples Etats membres d’une construction supranationale[208] ». Aussi est- elle la « refondatrice de la souveraineté[209] » des Etats membres.

Par ailleurs, cette politique d’intégration n’épargne pas le Congo-Brazzaville qui avec ses voisins de la région et ceux de la sous-région participe à des organisations reflétant le fédéralisme. En effet, la CEMAC, l’OHADA et le CAMES sont des institutions qui ont bénéficié de transferts de compétence étatique. Ces compétences dérivées de l’Etat sont limitées et spécifiques. Pour ce qui concerne l’OHADA, elle dispose non seulement des organes de décision dont les actes sont d’applicabilité directe mais aussi d’une juridiction gardienne du droit communautaire par harmonisation du droit positif des Etats car bien que juridiction de cassation, elle peut se prononcer sur le fond[210].

Il est vrai que les pères fondateurs des Etats africains aspirent à une solidarité pour relever le défi du développement. Ils ont manifesté une volonté farouche pour le fédéralisme qui a connu des échecs avant son retour sous une autre forme. Le Sénégal et le Soudan français (actuel Mali) en ont fourni un exemple sous l’appellation de fédération du Mali, voire aussi l’union du Cameroun anglophone et du Cameroun francophone en 1961 et celle de Tanzanie : union de Zanzibar et du Tanganyika. Les Etats africains se sont promis une telle solidarité dès la signature de l’acte constitutif de l’OUA, aujourd’hui l’UA.

Cette pratique du fédéralisme par association des Etats tend à faire disparaître les anciennes formes d’Etat qui du jour au lendemain prônent une décentralisation. Cette dernière est devenue une pratique très utilisée en droit positif des Etats. Elle contribuera à la transformation des Etats unitaires en Etats régionaux comme le Congo- Brazzaville si les gouvernements arrivent à laisser la gestion des intérêts locaux aux autorités locales décentralisées choisies sainement par les populations concernées et disposant d’une large manœuvre incluant l’autonomie ainsi que la participation dans la gestion de l’action de l’Etat. C’est ainsi que la Belgique fournit un exemple type de cette transformation.

En somme, l’organisation interne du pouvoir se fait davantage par fractionnement des compétences de l’Etat au sein du territoire en vue de rapprocher les populations de l’autorité. Dans ce monde où la pauvreté est un défi à relever, la décentralisation est préférée plutôt que la concentration de l’autorité, source de dictature et des conflits au Congo-Brazzaville. Cette décentralisation doit s’approprier les lois d’autonomie et de la participation, chères à un fédéralisme.

Les difficultés techniques de l’Etat dans plusieurs domaines justifient son adhésion à des associations d’Etats[211] souvent appelées OIG. Celles-ci prennent des natures différentes en fonction de la qualité de compétences transférées évoquées précédemment. En effet, les organisations d’intégration économique qui sont les plus répandues parmi celles créées au cours de ces deux dernières décennies dans les régions ou sous-régions prouvent le pas amorcé vers un fédéralisme qui n’est autre que l’intégration politique.

Le fédéralisme est le système le mieux adapté dans les Etats qui ont du mal à assurer l’effectivité de l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du territoire national. En effet, cela semble témoigner de la volonté de la nouvelle politique de décentralisation au Congo-Brazzaville fondée sur une « municipalisation accélérée » et qui se concrétise par une rotation de la célébration de la fête nationale entre les différents chefs-lieux des départements depuis 2003.

CONCLUSION

La question de la théorie de la souveraineté est en droit à l’origine de plusieurs doctrines qui ne prennent pas toutes la même direction en vertu de l’ordre qu’elles prétendent défendre. Le concept de « souveraineté », longtemps promis à la disparition dans le jargon juridique[212] contemporain, résiste toujours à l’instar de l’avènement de la fin de l’Etat[213] jusqu’alors qui n’est pas au rendez-vous. Cela ne peut étonner en raison des vues différentes de nombreux spécialistes qui se sont intéressés à ce concept de « souveraineté », qu’elle soit de l’Etat ou dans l’Etat. La souveraineté attachée à l’Etat ne peut être considérée comme un « mouton docile » prêt à abattre dans une boucherie tant qu’existera l’Etat.

Sa vivacité et son importance explique le volume d’œuvres qui lui sont consacrées. En effet, ce concept qui se comprend dans une perspective sociologique comme un pouvoir de commandement est un fait de société que Jean Bodin n’a fait que systématiser dans un discours logique.

La souveraineté de l’Etat n’est que l’expression de son indépendance. Or celle-ci, en réalité, couvre beaucoup de domaines qui exigeraient son emploi adjoint à des qualificatifs à l’ère de la mondialisation où les hommes sont plus proches les uns des autres par la multiplication des échanges et la révolution des communications. Si la République du Congo est indépendante politiquement, elle n’est pas encore indépendante juridiquement et économiquement. Cela concerne aussi les secteurs d’activités qui par leur technicité échappent au contrôle des gouvernants qui ne s’intéressent qu’à leurs intérêts. Ainsi, les Multinationales, en vertu de la capacité de leurs manœuvres dans toutes les directions et leur poids prônent une internationalisation « vécue comme une source de nuisance[214] », y ont trouvé leur champ d’action pour faire leur loi.

Cette dépendance est le fruit de la mauvaise relation entre le pouvoir, le territoire et les populations. L’autorité de l’Etat est encore au niveau de l’organe qui incarne celle de l’Etat, une souveraineté intuitu personae. Cela est dû à une lecture de la pratique constitutionnelle française de la V è République sans pour autant ne pas chercher à scruter dans une culture nationale riche des valeurs d’organisation de l’autorité politique. Dès lors que l’Etat se construit dans une copie des valeurs exogènes, il y aura toujours une dépendance à l’égard des auteurs de ces valeurs et des égarements dans des copies mal appliquées.

Or, la conjoncture actuelle est celle d’ouverture, celle d’uniformisation des institutions, des modèles qui refléteront la réalité sociale de cet Etat. De ce fait, les politiques d’ajustement structurel des institutions de Brettons Wood sont à l’origine de beaucoup de maux dans la société. Un Etat, longtemps le premier employeur, accepte des propositions de restructuration des institutions aux dépens de sa population car il ne bénéficie pas des investissements étrangers, source de création des emplois dans le secteur privé.

Une telle situation ne trouvera de remède que dans une rationalisation de la puissance étatique par l’institutionnalisation de l’administration centrale avec un corps de fonctionnaires recruté par leur mérite et non par les affinités, la consécration de la neutralité des forces de l’ordre qui sont le symbole même de la souveraineté dans l’Etat. Les gouvernants devront adopter un discours concret assis sur le respect de la personne humaine et ne plus suivre la « politique de la vitre[215] ».

La société internationale réalise aujourd’hui les méfaits d’une politique assise sur les intérêts qui ont causé des dommages à l’humanité. Cette attitude illustre la pratique de la politique internationale qui est celle d’intérêts, une politique composées par les politiques nationales des Etats. En effet, il n’y a pas d’amis en politique et ce sont les intérêts qui conditionnent les orientations prises par les acteurs politiques. Plus que les intérêts de la sécurité humaine seront relégués au second plan, les laissés pour compte de ce système des choses développeront une haine envers ceux qui prononcent des discours salvateurs et font le contraire.

L’affaiblissement de l’autorité au Congo-Brazzaville comme dans d’autres Etats de la région est exploité par de nombreux acteurs des relations internationales. En effet, tout ce qui milite pour une démocratie de par le monde ignore encore que la paix sociale n’est pas dans la démocratie forcée car toute entreprise forcée finit par révolter les individus qui en sont victime.

La voie du consensualisme est la mieux adaptée dans une République où la convivialité dans le règlement de différends compte plus que le gain. Mais, les objectifs du millénaire[216] resteront une illusion dans tout Etat qui n’a pas encore développé les liens entre la Nation et l’Etat ou qui hésite encore à dynamiser l’autorité de l’Etat au lieu de celle des gouvernants. Une image proche de celle de Louis XIV, « l’Etat, c’est moi ». Par conséquent, la souveraineté de l’Etat, c’est celle des gouvernants ; seuls eux sont souverains et non l’Etat.

Tout cela devrait faire réfléchir les différents sujets et acteurs internationaux dans les différents rapports commerciaux entre le Sud et le Nord. Une question devrait se poser sur la finalité des fonds découlant de ces accords en vertu des objectifs du millénaire sur les plans politique, économique, environnemental et humain parce que la souveraineté de l’Etat ne doit plus être un obstacle pour assister un groupe humain en souffrance.

Le Congo-Brazzaville est adepte non pas d’une souveraineté utilisée comme une revendication de liberté à l’intérieur des limites de la norme juridique, mais plutôt comme une base de récusation de tout un plan de cette même norme. La souveraineté sert, de ce fait, une revendication de la liberté contre le droit en se fondant sur des libertés anti-juridiques. Ce point de vue purement politique de la souveraineté est celui qui entre en contradiction avec le droit, en cela il représente les raisons du pouvoir qui ne se recouvrent pas avec celles du droit. Par conséquent, du point de vue juridique, la souveraineté de l’Etat ne peut par hypothèse s’opposer au droit international. Elle n’indique pas une puissance d’ordre politique sinon une compétence conférée par le droit lui-même. Cette incongruence[217] inévitable entre les deux sens de la souveraineté persistera tant que l’Etat restera une unité de pouvoir en possession de ses fins propres.

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II- MANUELS ET MEMENTOS

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III- ARTICLES

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IV- MELANGES

Mélanges en l’honneur du professeur François Borella, PU de Nancy, Nancy, 1999.

Mélanges offerts au professeur Jean-René Dupuy, Pédone, Paris, 1991.

Mélanges en honneur du professeur Guy Braibant, Dalloz, Paris, 1996.

Mélanges en l’honneur du professeur Michel Alliot, Presses de la Sorbonne, Paris, 2000.

Mélanges offerts au professeur Charles Chaumont, Pédone, Paris, 1984.

Mélanges offerts à Jorge Campinos, PUF, Paris, 1996.

V- THESES

CHALTIEL (F.), La souveraineté de l’Etat et l’Union européenne (thèse de droit), LGDJ, Paris, 2000.

LOMBARD (J.), Autorités traditionnelles et pouvoirs européens en Afrique noire (thèse de droit), A. Colin, Paris, 1967.

MOUTSOUKA-KATA (M.), Les disparités de l’encadrement administratif en République populaire du Congo, thèse de droit, Paris V, 1987.

NIKIEMA (A.), Evolution du régime politique de la Haute-Volta depuis l’indépendance, thèse de droit, Poitiers, 1979.

NTSAKALA (R.), Les conférences nationales de démocratisation en Afrique francophone et leurs résultats, thèse de droit, Poitiers, 2001.

PORTALIS (J.), Examen critique de quelques théories sur les limites de la souveraineté interne de l’Etat, Montpellier (thèse de droit), éd G. Mathieu, Nice, 1927.

SALIS (J.), Essai sur l’évolution de l’organisation judiciaire et de la législation applicable au Gabon-Congo Afrique équatoriale française, thèse de droit, Toulouse, 1939.

SIMON (O.), Le droit international face aux différends territoriaux dans le nouveau contexte des relations internationales, thèse de droit, Nancy II, 2005.

VI- COLLOQUES ET CONFERENCES

Conférence internationale de Paris sur le droit à l’assistance humanitaire, janvier 1995, in www.unesco.org (décembre 2006).

DARBON (D.) et DU BOIS DE GAUDUSSON (J.), dir., La création du droit en Afrique, Karthala, Paris, 1997.

DRAGO (R.), dir., Le rôle et la place de l’Etat au début du XXI è siècle, PUF, Paris, 2001.

DU BOIS DE GAUDUSSON (J.) et BLANC (F.-P.), dir., Le statut du chef de l’Etat en Afrique, PU de Perpignan, Perpignan, 2002.

FOUCHARD (P.), dir., L’OHADA et les perspectives d’arbitrage en Afrique, Bruylant, Bruxelles, 2000.

KHERAD (K.),dir., Les implications de la guerre en Irak, Pédone, Paris, 2004.

SEDJARI (A.), Quel Etat pour le XXI è siècle ?, L’Harmattan, Paris, 2001.

SFDI, L’Etat souverain à l’aube du XXI è siècle, Pédone, Paris, 1994.

SFDI, Les Nations-Unies et le droit international économique, Pédone, Paris, 1986.

ZARKA (Y-C.), dir., Jean Bodin, PUF, Paris, 1996.

VII- D’AUTRES DOCUMENTS D’ETUDES

a)- Ouvrages

Laboratoire d’anthropologie juridique de Paris, droit, gouvernance et développement durable, Karthala, Paris, 2005.

b)- Revues et presses

Afrique contemporaine, dossier spécial sur le Congo-Brazzaville, documentation française, n°186, avril-juin 1998.

Le Monde du 27 novembre 1997.

Le Monde (n°352) d’avril 2006, dossier sur « l’économie ».

Le Monde diplomatique d’avril 1977 et d’avril 1999.

Les Temps modernes, n° spécial « La souveraineté, horizon et figure de la politique » (vol. 610), 2000.

Politique africaine, France-Afrique. Sortir du pacte colonial, n°105, 2007.

c)- Cours

BIKOUMOU (B-R.), Cours de droit international économique (II) enseigné à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville, inédit, année académique 2003-2004.

ITOUA (G.), Cours de droit international économique (I) enseigné à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville, inédit, année académique 2003-2004.

MAKOUDZI-WOLO (N.), Cours de droit constitutionnel enseigné à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville, inédit, année académique 2000-2001.

d)- Textes de constitutions et rapports officiels

Constitution congolaise du 20 janvier 2002.

Documentation française, « Constitution française du 4 octobre 1958 », n°1.04, 2006.

GABOU (A.), Les constitutions congolaises, LGDJ, Paris, 1983.

Rapport de la commission internationale pour la sauvegarde de la souveraineté des Etats du 30 décembre 2001.

Rapport de l’assemblée nationale (commission affaires juridique et administrative), Brazzaville, 11 février 2003.

e)- Sites de recherches

www.google.fr: moniteur de recherches.

www.congo-site.com: site officiel du Congo-Brazzaville.

www.un.org: site officiel de l’ONU.

www.jeuneafrique.com: site du magazine Jeune Afrique.

www.cicr.ch: site du Comité international de la Croix-Rouge.

www.lasemaineafricaine.com: site de l’hebdomadaire de l’Eglise catholique du Congo-Brazzaville.


[1] COMBACAU J., SUR S., CARRE DE MALBERG R., TACHI S., HUBERT M., etc.

[2] TACHI S., « La souveraineté et le droit territorial de l’Etat », in RGDIP 1931, p 413.

[3] KOLB R., Réflexions de philosophie du droit international, Bruylant, 2003, p 119.

[4] Epître de Paul aux Corinthiens (I), 11 : 3.

[5] Epître de PAUL aux Romains, 13 :1.

[6] Epître de PAUL aux Corinthiens (I), 13 :11 et ss.

[7] Toute autorité vient de Dieu.

[8] DE MONTMORENCY, « Le concept de souveraineté », in RGDIP 1931, p 401.

[9] Pour PICQ J., l’autonomie politique présente dans la pensée aristotélicienne, puis perdue de vue avec l’augustinisme politique, est retrouvée à

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